En ce Froid matin de 1912, les habitants de la petite ville de Sommerhall, près de Cardiff, sont intrigués par l'arrivée du fourgon noir de la police locale. Le fourgon s'arrête devant la maison des Dumfries, une jolie maison blanche, cossue, entourée d'un jardin fleuri. Une maison habitée par une famille bourgeoise. Tandis que les chevaux du fourgon s'ébrouent dans la brume matinale, les policiers vont tirer la sonnette de la famille Dumfries. Un domestique à grands favoris blancs vient ouvrir. Les policiers le bousculent un peu en demandant : — Mme Dumfries est là ? Ils n'attendent même pas la réponse et s'engouffrent dans le grand hall dallé de blanc et noir. Le domestique reste interdit sur le seuil : — Messieurs ! Je vous en prie ! Madame est encore dans sa chambre ! Elle ne peut vous recevoir à une heure aussi matinale ! Quelques minutes plus tard, les policiers dégringolent littéralement l'escalier qui les a menés au premier étage. Entre eux, solidement maintenue par les deux plus forts gaillards de l'escouade, Clarissa Dumfries se débat. — Lâchez-moi ! Lâchez-moi ! Vous ne savez pas ce que vous faites. Je me plaindrai en haut lieu. Vous entendrez parler de moi ! Le petit groupe de villageois curieux qui s'est rassemblé, à tout hasard, devant la maison des Dumfries, la voit surgir, écumante de rage, le cheveu en désordre. Elle se débat comme une vraie sorcière. Peut-être y a-t-il une bonne raison à ça... Quand le fourgon s'éloigne, on voit le visage de Clarissa Dumfries qui apparaît derrière la vitre de la porte arrière. On la voit qui hurle, mais on ne distingue pas un mot des paroles qu'elle profère. Les commentaires et les suppositions vont bon train : — Il paraît que, dans sa cave... Le reste se perd dans le brouhaha de la foule : — Mais c'est incroyable, Clarissa Dumfries, une femme si distinguée, l'épouse du notaire, la mère de trois adorables enfants ! Je ne le croirai qu'en le voyant de mes propres yeux... La dame qui doute de la culpabilité ne verra jamais de ses propres yeux les preuves des crimes qu'on impute à la charmante Clarissa Dumfries. Mais la police les voit, ces preuves, et la presse locale en parle abondamment, avec horreur : «Macabre découverte dans les caves de la maison du notaire Richard Dumfries. Une dizaine de cadavres de nouveau-nés, égorgés et complètement vidés de leur sang ! Clarissa Dumfries se livrait à des messes noires au milieu de tout un attirail de poupées maléfiques, de fioles de poison et de livres consacrés au satanisme...» Des photographies montrent le cercle magique au milieu duquel, au cœur de la nuit, Clarissa Dumfries, autrefois jeune fille bourgeoise, se transformait en suppôt de Satan. A présent, pour les policiers, il est temps de procéder à l'interrogatoire de la suspecte. De lui faire avouer ses crimes. Mais Clarissa Dumfries n'avoue rien et adopte une attitude qui fait transpirer à grosses gouttes les représentants de l'ordre : — Vous ne pouvez rien contre moi ! Je suis une fidèle servante du maître des Ténèbres ! Il me protège et grâce à lui je suis immortelle. Il faut bien qu'elle se croie immortelle car la monstruosité des crimes qu'on lui reproche ne peut, en 1912, que la conduire directement sur l'échafaud, la corde au cou... Mais enfin, pourquoi avoir assassiné ces nouveau-nés, ces victimes innocentes ? Clarissa Dumfries hurle, hystérique : — C'est Satan, mon maître, qui exige, chaque jour, sa dose de sang frais ! Le commissaire qui dirige l'interrogatoire est un homme solide. Il a les pieds sur terre et, en sortant de cette pénible séance, il confie à son adjoint : — Malheureusement, je crois qu'il s'agit bien d'un cas de folie meurtrière. Toutes ces histoires de Satan qui réclame ses pintes de sang chaque nuit ! Nous allons devoir incarcérer Mme Dumfries à la prison centrale du comté. (à suivre...)