En mélangeant quelques petits grammes d'héroïne, de marijuana et de cocaïne, un adolescent avait eu les plus folles hallucinations. Comme lui, beaucoup de jeunes ont raconté, hier soir, lors d'une émission télévisée consacrée à la toxicomanie, leur déshonneur non sans remords. Une prise de drogue procure les plus folles des hallucinations. «Hier j'ai vu Ben Laden à Adekkar, il m'a salué et je lui ai dit de passer le bonjour à Ayman Zawahiri», témoignait Akli R., un adolescent de Béjaïa qui, dans ses aveux à la télévision algérienne, lors d'une émission consacrée aux affres de la toxicomanie, donnait des astuces aux enquêteurs pour la traque du numéro un d'Al-Qaîda : Deux grammes d'héroïne, autant pour la cocaïne et un peu moins de marijuana… une mixture qu'il a l'habitude d'ingurgiter depuis déjà plusieurs mois, c'est-à-dire juste le temps de devenir un consommateur acharné. Un consommateur détruit. «Je ne ressens plus mes muscles et je sais que je vais mourir un jour», a-t-il dit, à la journaliste qui l'interviewait. Deux heures durant, l'émission à laquelle étaient conviés des spécialistes de tout bord, aura constitué une tribune à une pléthore de jeunes, des ados notamment pour raconter leurs premiers pas qui menaient à l'enfer, eux qui croyaient frapper au portes du paradis… «Un ami de classe m'a montré un joint… nous l'avons fumé tous les deux. J'avais la sensation d'être sur un nuage, d'être au paradis et pour continuer à consommer, je suis allé jusqu'à prendre tout l'argent de ma mère», a raconté par petites phrases entrecoupées, Hakim, adossé à un mur, juste devant sa maman qui pleurait à chaudes larmes parce qu'elle ne sait comment faire pour sauver son petit : «Un jour il m'a demandé de l'argent pour monter une affaire. Je lui ai donné alors ma part d'héritage. Je ne savais pas qu'il allait chercher cette pourriture pour se droguer.» Le martyre de cette mère dure encore des années. Son fils devient un démon lorsque la drogue venait à manquer : «J'étais forcée de lui chercher de l'argent car il fallait le calmer à tout prix. Maintenant, il a tout vendu… ses vêtements, les trois télévisions que nous possédions et de l'électroménager.L'enfer, c'est chez nous qu'il existe», concède la mère de Hakim, le visage anéanti par la douleur. Une autre mère, tout aussi ruinée, parle de son enfant. sur l'état civil, on le nomme Hosni, mais dans le quartier, on lui a ajouté un sobriquet infamant : hosni «Lemkhda» (l'oreiller) parce que tout simplement, selon les dires de son ascendante, «les barbituriques l'ont endormi depuis huit mois». «Il est au lit depuis huit mois et il ne sort pratiquement plus. Il prend du tranxène, il se drogue et il se pique chaque deux heures. Tout le temps comme ça depuis huit mois….». Les filles, elles, ne sont pas épargnées. Faïza fait partie de ses adolescentes qui dans un CEM ou dans un lycée, tâtent de petits joints. Elle a connu le kif à 14 ans et la cocaïne deux ans plus tard. «Je pensais que c'était comme dans les séries télévisées…», dit-elle en sanglots.