Pour sa première compétition officielle et sa première déclaration à la presse lors de cet Euro-2008, le président de l'Uefa Michel Platini est un homme heureux. Hier, devant les journalistes, il faisait le bilan d'une compétition qu'il qualifia de belle et de conviviale qui a rassemblé plus d'un million de spectateurs dans les stades suisses et autrichiens. Pour l'ancienne gloire du football français, les équipes défensives et poussives n'ont pas été récompensées contrairement aux équipes qui ont joué pour gagner et qui ont fini par s'imposer, avant de lancer une phrase probablement prémonitoire : «En me rasant ce matin, je me suis dit que je donnerais peut-être la coupe aux Espagnols, vingt-quatre ans après la leur avoir prise.» Et en évoquant le rasage, c'est toute la nation ibérique qui a commencé à se couper les tifs après qu'un pari a été lancé pour célébrer la victoire finale de la Seleccion ce soir face à la Nationalmannschaft au stade Ernets-Happel de Vienne. Une finale inédite entre deux grandes nations du football européen, au style différent, avec d'un côté une Allemagne toujours compétitive à la recherche d'un quatrième titre et une Espagne plus brillante que jamais, mais plus gagnante depuis quarante-quatre ans. La Furia Roja sera privée certainement de son attaquant et meilleur buteur du tournoi, David Villa, alors que la participation de Mickael Ballack avec l'Allemagne est compromise pour une contracture au mollet droit. De l'avis de tous les observateurs et spécialistes, si l'Espagne parvient à rééditer sa partition contre la Russie en demi-finales, notamment en seconde mi-temps, elle sera championne d'Europe, d'autant qu'elle reste la seule équipe invaincue depuis le début de la compétition, ce qui n'est pas le cas pour l'Allemagne. Cette dernière a déjà subi, sans réagir, la loi des Croates au premier tour, gagner petitement face à l'Autriche et puiser dans ses ressources pour venir à bout d'une Turquie diminuée en demi-finales. Toutefois, outre le réalisme (efficacité prouvée à travers trois tirs cadrés transformés en buts contre la Turquie), les statistiques entre les deux équipes sont favorables aux Allemands (8 victoires pour 5 à l'Espagne et 6 matchs nuls depuis 1935), alors que sur cet Euro l'Espagne part plus avantagée (11 buts marqués pour 3 encaissés contre 10 buts marqués et 6 encaissés pour les hommes de Löw). Reste que le style de jeu espagnol est plus beau, fait de combinaisons et à une touche de balle articulée autour d'un 4-1-3-2 compact en opposition au 4-2-3-1 allemand d'une efficacité déconcertante. Quant au mental, l'esprit conquérant de la Mannshaft se heurtera au moral retrouvé d'une Seleccion débarrassée de la malédiction des quarts. Maintenant, espérons que la note finale sur laquelle se terminera l'Euro-2008 soit celle d'un football de charme et d'attaque qui a déjà récompensé les deux finalistes. Que tout le monde se rase alors le crâne ! Vous comprenez où je veux en revenir.