"Illusion" Ils quittent leur pays avec de grands espoirs? L?Algérie est devenue chez nombre d?Africains, un véritable eldorado. A leur retour chez eux, les étudiants inscrits dans les différentes universités, ne tarissent pas d?éloges pour un pays riche où tout le monde mange à sa faim et se soigne gratuitement. Les informations sont carrément bues par des personnes qui végètent dans leurs cases, vivant ou plutôt survivant d?expédients. Bien entendu, ils auraient bien aimé avoir cette chance chez eux, mais? Le créneau est alors exploité par des personnes spécialisées dans l?aide à l?émigration clandestine. Communément appelés passeurs, ils sont le dernier recours aux candidats au voyage qui n?ont pas eu la chance de pouvoir quitter le pays par les voies légales. Charmés ou plutôt envoûtés par l?appel d?une vie meilleure, les aventuriers ne manquent pas. Ils savent pertinemment que le prix n?est pas à leur portée, mais ils sont disposés à trimer pour réunir une véritable «fortune». Les passeurs qui savent qu?ils ont trouvé un véritable filon, n?hésitent pas à courir tous les risques. Pour rentabiliser les passages, ils attendent d?avoir plusieurs demandes pour décider enfin de passer à l?acte. En véritables gestionnaires, ils mettent au point des plans d?action. Ils ont leurs réseaux logistiques. C?est ainsi qu?ils font appel dans chaque pays qu?ils traversent à des taxis brousse. Lorsqu?ils réunissent 20 candidats au voyage au minimum, les passeurs, jugeant que le jeu en vaut la chandelle, décident alors d?organiser l?expédition. Ils font parvenir le message à tous ceux qui se sont inscrits pour qu?ils prennent leurs dispositions. C?est ainsi qu?ils leur donnent rendez-vous de nuit et dans un endroit à l?abri des regards. A l?heure indiquée, le groupe d?émigrants sont au rendez-vous. Ils prennent place dans les taxis brousse qui démarrent en trombe. Le long périple débute alors sur des pistes cahoteuses. Les véhicules ne sont pas neufs, mais de vieux tacots qui continuent à rouler grâce au savoir-faire des mécaniciens. Ces derniers, passés maîtres en rafistolage, réussissent à faire démarrer toute épave qu?on mettrait entre leurs mains. Evidemment, l?état des voitures ne permet pas un transport de passagers dans de bonnes conditions. Lorsqu?ils arrivent à proximité des frontières entre deux Etats, les passagers doivent mettre pied à terre pour les franchir par des chemins détournés. De l?autre côté des frontières, d?autres vieux tacots les attendent. Après un trajet de plusieurs heures et d?autres frontières passées, ils parviennent enfin à Tamanrasset pour prendre la route d?Alger. Mamadou et Ibrahim sont à Alger depuis quelques semaines, où ils sont pris en charge par d?autres compatriotes arrivés avant eux et qui connaissent déjà les rouages de l?émigration clandestine. Les anciens ne vont pas n?importe où, ils savent les endroits les moins exposés aux descentes de police. Mamadou et Ibrahim, qui n?ont pas respecté les consignes de leurs compatriotes, sont arrêtés par des policiers au square Port-Saïd. Présentés devant le parquet, ils sont inculpés et écroués pour immigration clandestine et séjour illégal. Lorsqu?ils comparaissent devant le tribunal correctionnel d?Alger, ils évoquent les grandes difficultés qu?ils rencontrent dans leur pays. «Je ne peux pas trouver de travail chez moi où j?ai laissé une femme et 5 enfants», affirme Mamadou. Ibrahim abonde dans le même sens. Le procureur de la République requiert 6 mois de prison et leur reconduite aux frontières. Au terme du procès, chacun des prévenus écope de 6 mois de prison avec sursis quant à la reconduite aux frontières le président du tribunal rappelle que c?est une décision administrative et non judiciaire.