Constat n Longtemps, l'on a attribué la crise du théâtre algérien à des pressions externes et indépendamment de la volonté des gens du théâtre. Tous s'accordent à affirmer que la crise est politique. En termes clairs, l'absence d'une politique culturelle en mesure de prendre efficacement en charge toute la pratique théâtrale fait que le 4e art, continue à connaître des jours amorphes. En réalité, ce ne sont ni la crise de texte, ni l'absence de la critique, ni même le manque d'infrastructures et bien d'autres facteurs qui sont, principalement, à l'origine de la crise que vit actuellement, et depuis quelques années, le théâtre algérien. L'une des raisons qui, effectivement, fait que le théâtre algérien n'arrive pas à s'arracher d'un tempérament atrabilaire est l'absence de communication entre ceux qui le pratiquent. « Ceux qui tuent le théâtre, ce sont bien les gens du théâtre», ne cessent de dire et de répéter nombre de comédiens. Si l'on étudie de près cette affirmation, l'on constate en effet que les gens du théâtre sont, en partie, la cause de cette situation par laquelle se distingue le théâtre algérien. La raison est que chacun prétend détenir le savoir théâtral et en être le garant et dépositaire. Ce qui se fait par les autres n'est manifestement pas beau ni bon. L'exercice théâtral en soi est ramené au Moi. Ce Moi arrogant et unilatéral. Chacun cherche à imposer – souvent d'une manière inconsidérée et exclusive – sa vision et son attitude et à en exclure celles des autres sous prétexte d'être inassimilable à son incontestable théorie – chacun impose son idée, mais sans qu'il ait le souci de l'argumenter. Les gens du théâtre ne communiquent pas entre eux, ne confrontent pas leurs idées et ne partagent pas leurs expériences – car chacun prétend que son idée ou son expérience est la meilleure – dans des débats enrichissants et constructifs. Il n'y a pas – ou très peu – de dialogue. Et lorsqu'ils entament une discussion, celle-ci prend toujours des tournures calamiteuses, voire pitoyables. Elle finit toujours par des altercations verbales. Ça se crie et ça s'engueule. Dès que quelqu'un prend la parole, l'autre le coupe pour placer la sienne, l'imposer à l'assistance. Les voix s'envolent, et les paroles se heurtent. L'on assiste alors à des échauffourées verbales et à des chamailleries de polissons – pareille comportement donne une pathétique image de ceux qui, soi-disant, sont des gens du théâtre. En outre, tous sortent du sujet initialement tracé par le modérateur pour que chacun aborde et édicte sa sensibilité et à travers laquelle est évoquée sa personne. Tous parlent de tout et de rien sauf de la problématique en question. Ils s'accusent et se rejettent la faute. Aussi bien metteurs en scène, comédiens que dramaturges, tous, ou la plupart, ne savent pas écouter. Aucun, ou presque, n'a cette présence d'esprit de se mettre à l'écoute de son destinataire. Tous font la sourde oreille. Ils pratiquent certes de l'art, mais ils ne possèdent pas l'art d'écouter, d'évaluer le discours de leur locuteur. Ainsi, l'absence d'écoute engendre systématiquement un manque de discernement qui, lui, engendre un manque de savoir et de savoir-faire. Cela fait que le théâtre algérien, en dépit d'une relance palpable de l'exercice théâtral, à être sujet à des considérations et humeurs individuelles. Il continue à piétiner dans l'immobilisme. L'autre constat regrettable à relever, c'est au moment des représentations théâtrales : aucun de ceux qui se disent d'eux-mêmes gens de théâtre ne suit, du début jusqu'à la fin, le déroulement de la pièce. La plupart préfère, alors que leurs confrères ou leurs consœurs se produisent sur scène, se constituer en groupe dans le hall du théâtre pour critique la pièce ou entamer des conversations creuses, ou simplement aller s'attabler au Tantonville – un café jouxtant le théâtre national.