Résumé de la 1re partie n Martin-Guillaume Biennais, créateur de la couronne de feuilles d'or de Napoléon Ier aide financièrement ce dernier bien avant l'accession de ce dernier au pouvoir... «Ma solde de général ne me permet pas d'acquérir tout ce qui m'est nécessaire...» Le général Bonaparte omet de dire que son épouse la délicieuse et frivole Joséphine est un vrai panier percé qui l'empêche irrémédiablement d'équilibrer son budget. Et, pour la seconde fois, Martin-Guillaume Biennais ouvre un large crédit au brillant général dont le regard dit à la fois l'ambition et la destinée hors série... En effet, Biennais n'a pas obligé un ingrat : dès qu'il en a le pouvoir, Bonaparte, à la fois par reconnaissance et par admiration pour le talent de l'artiste, en fait son orfèvre favori et s'intéresse à ses créations. La boutique de Biennais, au Singe violet, devient le rendez-vous de l'élite impériale. Et c'est ainsi que Biennais se voit confier, pour la cérémonie du couronnement, d'importantes missions : la création du sceptre impérial et de la boule du monde, qui l'accompagne normalement. Il y a aussi la main de justice. Ces trois objets devront être réalisés en vermeil. Biennais se voit aussi charger de la conception et de l'exécution du grand collier de la Légion d'honneur, ainsi que de la couronne du sacre. Dans la calèche, l'orfèvre ouvre une dernière fois l'écrin de satin dans lequel repose la couronne. Des feuilles d'or pur, sculptées au naturel. Les nervures sont apparentes. On dirait que l'orfèvre a simplement trempé des feuilles de laurier dans de l'or en fusion... Biennais est introduit auprès de Napoléon qui, seul dans son bureau, médite sans doute à son étoile et à son prodigieux destin. Bonaparte, quand on lui annonce son bijoutier favori, connaît immédiatement le motif de cette visite : la couronne. Biennais ouvre l'écrin, et Napoléon peut admirer le merveilleux travail, les feuilles qui pointent vers l'avant et sont délicatement retenues à l'arrière par un ruban d'or, à la mode romaine. «Bien, essayons-la.» Biennais pose la couronne sur le crâne qui commence à se dégarnir – de celui qui est déjà le maître d'une grande partie de l'Europe. Le verdict est immédiat : «Elle est belle, mais elle est lourde. — Sire, il a fallu de nombreuses feuilles pour commémorer vos nombreuses victoires... — Il y en a trop. Que dirait-on si on me voyait pencher la tête sous le poids de ma couronne ? — Il ne me reste qu'une solution : enlever quelques feuilles. — De toute manière votre œuvre, Biennais, restera dans l'histoire.» Dès qu'il rentre à son atelier, l'orfèvre s'attelle à la tâche. Il n'y a pas de temps à perdre. Il ne laisse à personne le soin de modifier la couronne impériale. Pourtant ses ateliers sont pleins d'ouvriers il en aura jusqu'à six cents – et ses collaborateurs les plus proches sont d'éminents orfèvres eux aussi. Bien qu'il les utilise de moins en moins, ses mains habiles connaissent encore tous les gestes précis qui doivent permettre la modification invisible exigée par Napoléon. Tout en déposant sur l'établi six feuilles d'or fin, une idée lui vient, qui amène un sourire sur ses lèvres. Le soir, en regagnant son hôtel particulier, cossu et garni avec le plus grand soin de meubles qu'il a lui-même dessinés, Biennais est heureux, car il a réussi la modification demandée. Il est heureux aussi de se retrouver dans le cadre familial, auprès de son épouse et de ses filles. En effet, le sort a voulu qu'il ait six filles et pas un seul garçon. Et elles sont toutes encore célibataires. Mais elles sont si jolies, si bien élevées, si ravissantes, qu'il n'a aucune crainte pour leur avenir. Biennais raconte en peu de mots sa visite à l'empereur, le bon accueil que celui-ci a bien voulu faire à la couronne, et la modification qu'il a demandée... «J'ai donc retiré quelques feuilles, six exactement, et puisque j'ai le bonheur d'avoir six filles, voici pour vous.» Il sort alors de ses poches six délicieux petits écrins et en remet un à chacune de ses filles. «Ces feuilles d'or représentent un peu de l'histoire de France. Gardez-les, et que vos enfants les gardent après vous.» Une seule de ces feuilles est parvenue jusqu'à nous, chez une arrière-petite-fille de l'orfèvre. Que sont devenues les cinq autres ?