Importance n C'est une vérité commerciale absolument incontournable : le plus juteux des marchés du transport est celui qui reste lié à un tourisme spécifique, le pèlerinage religieux. D'abord parce qu'il mobilise des moyens énormes et ensuite parce que les candidats à la quête spirituelle se comptent par milliers et même par millions s'agissant des lieux-saints de l'islam, entre autres. Il paraît clair que chaque religion monothéiste possède ses propres sites sacrés. Les juifs maghrébins, par exemple, vénèrent tout particulièrement un marabout à Tlemcen au point de lui consacrer chaque année une visite en groupe. En revanche, l'église du vatican draine beaucoup plus de monde particulièrement à Rome à la veille de chaque fête religieuse comme l'ascension, les Pâques ou le Jour de l'an. Là encore, des agences très spécialisées prennent en charge l'événement aussi bien au niveau du voyage, de l'hébergement, du séjour que des différentes haltes spirituelles. Le Congrès mondial de la jeunesse catholique, qui s'est déroulé cette année en Australie et qui a réuni près d'un million de personnes, a été sous-tendu, on s'en doute, par une logistique de transport littéralement hors normes. Indépendamment de St Jacques de Compostelle, c'est la ville de Lourdes qui attire le plus de fidèles chaque année dans le monde. Pour illustration, en 2008, la cité a reçu plus de 150 000 visiteurs qu'elle a eu un mal fou à héberger compte tenu du nombre limité de ses hôtels et de ses pensions. Cet exceptionnel afflux de pèlerins coïncide en fait avec le 100e anniversaire de la vision de la vierge par la jeune Bernadette Soubirou. Il reste évidemment le pèlerinage à La Mecque. Le nombre de voyageurs dépasse largement les normes habituelles : 3 à 4 millions d'individus à transporter d'un bout du continent à un autre. A la veille de chaque Hadj, les compagnies étrangères se frottent les mains et pour cause : elles peuvent réaliser jusqu'à dix pour cent de leur chiffre d'affaires d'autant que la rotation de leurs appareils loués pour la circonstance peut durer plus d'un mois. Si les autorités saoudiennes le désiraient, le nombre des hadjis passerait du simple au quintuple. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle les places sont limitées pour chaque pays en fonction de sa population. A titre d'exemple, l'Algérie, pour 30 millions d'habitants, n'a droit qu'à 36 000 passagers. A la place d'agences comme en voit dans tous les pays du monde, en Arabie et spécialement à Médine et à Mecca, ce sont des moutawafs qui gèrent le séjour de tous les pèlerins quelle que soit leur nationalité ou la formule de voyage qu'ils ont adoptée. Hôtels et restaurants sont complets toute l'année surtout si l'on inclut les omra. Les cambistes sont si nombreux qu'ils travaillent souvent dans une échoppe de quelques mètres carrés. Les magasins de souvenirs sont ouverts en permanence et ne ferment pratiquement jamais. Même les lieux de culte sont pris d'assaut particulièrement dans le périmètre du «Haram». Vous désirez prier devant la Kaâba, il faut jouer du coude, surtout les vendredis. Pour avoir une idée du gigantisme de cette ville et surtout de la ferveur des pèlerins, un seul chiffre dépasse tous les commentaires : un million de fidèles se pressent en silence dès l'aube pour la prière du fadjr devant la Kaâba. La ville de Médine où est enterré le prophète (QSSSL) est, elle aussi, submergée par les fidèles. Au-delà des modes touristiques qui peuvent changer en fonction de telle tendance ou de telle autre, le pèlerinage des musulmans aux lieux-Saints de l'islam est inscrit dans l'éternité.