Par Ould El Hocine Mohamed Chérif Ancien officier de l'ALN Pendant toute ma participation au combat libérateur, contre l'armée française, dans les maquis de la wilaya IV, j'avais toujours sur moi un petit carnet de route ; j'y écrivais, notais des noms, des dates, des lieux, tous ces événements qui m'ont marqué à tout jamais. J'y écrivais et relatais nos embuscades et accrochages durant la révolution du 1er-Novembre 1954. Combien sont-ils nos enfants de vingt ans, universitaires, les forces vives de l'Algérie de demain, à connaître le Commandant Si Zoubir de Soumaâ de son vrai nom Souleiman Tayeb ? Mort héroïquement au champ d'honneur le 22 février 1957 dans le douar de Sbaghnia dans la wilaya de Blida pour protéger la vie d'environ quatre cents étudiants et lycéens qui avaient fui les villes après la grève générale des huit jours et qui étaient en attente dans cette localité avant d'être envoyés en Tunisie et au Maroc afin de terminer leurs études. Mais le nombre important d'étudiants et lycéens restés trop longtemps à attendre la décision de l'ALN a attiré l'attention des soldats français, vers trois heures de l'après-midi, ils se sont retrouvés encerclés par une quinzaine d'hélicoptères «Sikorsky». Si Zoubir a donné l'ordre aux étudiants sans armes de sortir des refuges, de se replier en remontant l'oued. Lui seul a commencé l'accrochage en mitraillant les hélicoptères pour les empêcher de se poser et couvrir de la sorte le repli des étudiants ; le feu était nourri, le combat était inégal. Si Zoubir a été mortellement atteint d'une balle de mitrailleuse 12/7, et les parachutistes français se sont acharnés sur les étudiants désarmés. Si Zoubir est mort en chahid le 22 février 1957 ainsi que vingt-sept étudiants dont une lycéenne. «Allah yarham echouhada »… Aujourd'hui combien sont-ils nos adolescents à connaître le nom du Chahid Bouras Mohamed d'El Affroun mort à l'âge de 17 ans dans la bataille de Tamezguida le 22 mars 1957 où le commando Si-Zoubir a anéanti les paras de Bigeard, des éléments d'élite d'Indochine, et expérimentés en guérilla ? Ce commando qui était dirigé par le lieutenant Guillaume – qui n'était autre que le fils du général Guillaume, résident du Maroc – était formé de 58 soldats français volontaires, auxquels le colonel Bigeard avait promis des promotions de grade, sa mission était de faire une opération servant à démontrer à une délégation de sénateurs américains et français que la région de Blida était pacifiée et que seuls quelques rebelles communistes subsistaient encore. Après la violente bataille qui a duré du matin jusqu'au soir, la troupe de Guillaume a été décimée, et Si Zoubir ainsi que les 27 étudiants tués quelques jours auparavant, ont été ainsi vengés. La population française de Blida, la ville des roses, était en deuil ; leurs paras volontaires n'étaient pas revenus ; ils avaient été abattus par notre Commando, le commando Si-Zoubir sous le commandement de Si Moussa… Aujourd'hui qui de nos enfants connaît le nom du Chahid Benmira Tayeb de Theniet el-Had dit el-Istiqlal tombé au champ d'honneur le 26 avril 1957 dans la bataille de Sidi Mohand Aklouche dans la région de Cherchell ? c'était un vendredi, 27e jour de Sidna Ramadan, Leilet El- Qadr, lui qui, la veille, disait qu'il allait être Chahid dans la Bataille du lendemain et nous devancer au paradis Djenet El- Ferdous. Notre frère El Istiqlal a été touché par une roquette au ventre. Grièvement blessé, il était heureux et radieux de mourir pour l'Algérie. Ses derniers mots ont été : «Prenez mon arme, transmettez mon salut à mes compagnons et si un jour vous êtes de passage au douar Lira, passez le bonjour à ma famille et embrassez ma fille et maintenant laissez-moi mourir, partez vite partez vite !» el istiqlal nous sommait de partir car il savait que les troupes françaises nous poursuivaient. Au cours de ce combat, nous avons perdu notre compagnon El Istiqlal et nous avons eu deux blessés ; l'ennemi a subi de lourdes pertes qui s'élevaient à plus de soixante-quatre morts et des centaines de blessés et nous avons abattu deux avions «T6-Morane» … Beaucoup de mes compagnons de lutte sont morts au champ d'honneur. Je voudrais que leurs noms restent gravés dans les mémoires qu'ils ne soient jamais oubliés. Je voudrais que leurs proches, leurs parents, leurs douars et villages, sachent combien ils ont été courageux, braves, bons, valeureux, généreux, héroïques et loyaux envers leur patrie, pleins d'une foi inébranlable en une Algérie libre débarrassée du joug colonialiste et de l'injustice. Je voudrais que ne disparaissent pas de nos mémoires nos chouhada.