Art n Le travail du raphia, qui a pratiquement disparu ces dernières années de la panoplie des produits de l'artisanat national, a été rappelé, ces jours-ci, au bon souvenir des Constantinois. C'est par la grâce d'un stand qui focalise l'attention des nombreux visiteurs de l'exposition organisée dans le cadre de la Semaine culturelle de Médéa, que les habitants du Vieux Rocher ont pu redécouvrir la beauté de cette fibre exotique et ses multiples usages. C'est grâce aussi à Hacène Belakhdar, un talentueux artisan du Titteri, présent dans la Ville des Ponts au titre de cette manifestation culturelle ouverte mercredi dernier. Ce solide et modeste quarantenaire à l'œil vif expose, outre des paniers tressés, des sacs à main, des ceintures et autres bibelots et accessoires, d'ingénieux articles confectionnés à base de ce matériau végétal, suscitant un vif intérêt chez les visiteurs, de plus en plus nombreux au Palais de la culture Malek-Haddad, lieu de l'exposition. Cet artisan a non seulement réussi à sauver ce métier de l'oubli, mais il est parvenu aussi à le remettre au goût du jour en tirant des objet à la fois utiles et esthétiques comme des chaussures pour diabétiques et hypoallergéniques, finement tressées avec des brins de cette plante tirée des feuilles d'un palmier à tige forte, comprenant un grand nombre de variétés et croissant dans les régions tropicales. Ses souliers «bio», aujourd'hui adoptés et appréciés par les diabétiques, femmes et hommes à Médéa, ont également «vivement intéressé les visiteurs de la Semaine culturelle de Médéa, dans toutes les wilayas où elle est passée avant la halte constantinoise», affirme Hacène Belakhdar, consentant enfin à surmonter une sorte de mélange de modestie et de timidité. Il précise même, esquissant un sourire qui étire une moustache fournie, que cela lui a valu le titre de «premier artisan de raphia» à l'échelle nationale. Ce titre honorifique ne fait, dit-il, qu'accentuer chez lui le sentiment qu'il doit «veiller aujourd'hui, en tant que premier et pratiquement unique dépositaire de ce legs, à la transmission de ce savoir-faire acquis auprès d'un maître artisan de la ville marocaine de Fès». Il s'est dit heureux que la Chambre de l'artisanat et des métiers de Médéa ait pu lui accorder un local où il peut installer plus confortablement son atelier, auparavant aménagé dans un coin de sa modeste demeure et où ses quatre garçons sont ses seuls apprentis. Une «petite aide», pour lui permettre de continuer à s'approvisionner en raphia, une fibre excessivement onéreuse et qui vient de très loin, ne pourra cependant être que la bienvenue, tient-il à souligner, faisant part de sa détermination à contribuer à pérenniser cette activité artisanale. Sa volonté de ne pas lâcher prise est confortée par le fait qu'un lot important de chaussures pour diabétiques fabriqués par ses soins, a été récemment acquis, chez lui à Médéa, par une association d'aide aux malades atteints de diabète. Son regard laisse filtrer une pointe de fierté lorsqu'il évoque ce «succès commercial», même si, lorsque la question lui est franchement posée de savoir s'il en tire une satisfaction personnelle, il se contente de hausser les épaules, sa réserve et sa pudeur reprenant rapidement le dessus.