L'opinion footballistique sait bien qu'il se passe des choses bien bizarres dans notre sport roi, mais la dernière est digne des cabarets qui pullulent un peu partout à travers le pays et où des tabrihate et rachkate se font à coups de millions de centimes à vous couper le souffle. Le président de l'USM Annaba, Aïssa Menadi, lui, exécute ce rituel dans les vestiaires de son propre club lorsque son équipe gagne son match. En effet, et c'est une histoire véridique, chez les Tuniques Rouges ce n'est pas un barème qui fixe les primes de matchs, mais c'est bien une tabriha exécutée par le boss Menadi dans les vestiaires qui tranche combien percevront ses joueurs. Ainsi, au terme d'une rencontre gagnée, les joueurs sont dans le vestiaire et attendent avec impatience l'entrée de leur président et une fois qu'il fait son entrée, tous reprennent en chœur : «Goulha ya Menadi goulha ! (dis-le Menadi, dis-le).» A cela, le président réplique : «Hay khamssa» (voici cinq millions de centimes). Amusés, mais convaincus du montant de la prime, les joueurs renchérissent : «Zid goulha ya Menadi, zid goulha» (Redis-le Menadi, redis-le encore une fois). Aïssa Menadi se sent gonflé et annonce un autre chiffre : «Hay aâchra» (voici dix millions). Toujours plus gourmands, les joueurs poussent la chansonnette un peu plus loin : «Zid goulha ya Menadi, zid goulha.» Là, le patron annabi exécute un dernier tour de piste en lançant : «Hay khamsstach» (voici 15 briques) avant de s'éclipser des vestiaires signifiant à ses joueurs la fin de la surenchère et la fixation de la prime du jour à 150 000 DA par joueur (faites le calcul pour toute l'équipe) au moment où plus de 21 000 travailleurs de différents secteurs viennent d'apprendre qu'ils seront enfin payés par le gouvernement après plusieurs mois d'attente et de drames sociaux.