Frivolité n Marie-Madeleine Dreux d'Aubrey, la future marquise de Brinvilliers, est une jolie femme, au visage angélique. Mais très tôt, elle est habitée par le démon du vice. Ce 2 juillet 1630, à Paris, c'est la fête dans la demeure du sieur Antoine Dreux d'Aubrey, lieutenant civil au Chatelet de Paris. Sa femme vient de mettre au monde son premier-né, une fillette. L'heureux papa se penche sur le berceau et s'exclame : — quelle charmante enfant ! La mère, encore fatiguée par l'accouchement, a un pâle sourit. — elle vous plaît tant que cela, mon ami ? — oh, oui, ma chère… un petit ange ! Le lieutenant se penche encore davantage. — elle ouvre les yeux… Un véritable ciel d'été ! Et sa peau… Une blancheur éclatante… L'heureux père s'écrie : — elle sourit… Quelles mignonnes fossettes ! La mère est enchantée. — je suis heureux qu'elle vous plaise autant ! — ma chère, nous n'aurons pas de mal à la placer ! Elle sera certainement marquise ! En attendant qu'elle grandisse, la fillette, bien au chaud dans son berceau s'endort, sous le regard de ses parents. Tous les gens qui la verront s'extasieront sur sa beauté et la perfection de ses traits. «Un ange», répétera-t-on souvent. Mais la fillette qu'on prénomme Marie-Madeleine ne restera pas longtemps un ange. D'après la confession qu'elle rédigera plus tard, elle reconnaît qu'à peine âgée de cinq ans, le démon du vice l'habitait déjà. A sept ans, elle perd sa virginité en folâtrant avec des adolescents de sa parenté. Elle reconnaît aussi avoir eu des relations incestueuses avec ses jeunes frères. Plus elle grandit, plus Marie-Madeleine se pervertit. Elle multiplie les amants, au grand scandale de sa famille qui veut la marier. Son malheureux père se dit qu'en se mariant, sa fille s'assagira. Elle attire beaucoup de jeunes gens et beaucoup l'auraient épousé volontiers, mais on cherche pour elle un beau parti. Pas question qu'elle épouse un roturier ou un homme désargenté ! En 1651, Marie-Madeleine a 21 ans. Elle est d'une beauté incomparable et collectionne les amants. C'est alors qu'un prétendant se présente. Le marquis Antoine Gobelin de Brinvilliers, un gentilhomme de noblesse récente, est officier du régiment de Normandie. Il jouissait, à l'époque de son mariage avec Madeleine, de trente mille livres de rente. Ajoutés au vingt mille livres de la dot que lui ramenait sa femme, cela faisait une petite fortune. Mais le marquis est un joueur, c'est aussi un homme volage qui, non content d'avoir une jolie femme, multiplie les maîtresses. Il sait aussi que sa femme est, comme lui, de mœurs légères, mais il n'en fait pas grand cas. Il se montre même permissif à son égard. — vous ferez bien de surveiller votre épouse, lui disent ses amis. — est-ce qu'elle me surveille, elle ? Le père de la marquise, lui, se désole. Il a peur du déshonneur. (à suivre...)