Confidences n Lazhari Labter, auteur et éditeur, revient dans cet entretien qu'il nous a accordé, sur son recueil de récits La cuillère et autres petits riens, un livre dans lequel il raconte son enfance. InfoSoir : Dans ce recueil vous racontez votre enfance. Comment est né ce livre ? Lazhari Labter : Ce recueil a été possible grâce à un ami, l'artiste peintre et poète Arezki Larbi qui m'a vivement encouragé à mettre noir sur blanc quelques-uns des récits que je lui ai racontés lors d'une soirée conviviale. Je les lui ai racontés comme les raconterait un meddah sur la place publique. En écrivant le premier récit intitulé La Cuillère, je me suis pris au jeu et, un souvenir ramenant l'autre, j'ai fini par écrire l'ensemble des récits qui composent le recueil. Je les ai écrits surtout en hommage à mes parents disparus et pour perpétuer leur souvenir auprès des miens, notamment mes enfants. Tous les récits commencent par la formule «Je me souviens» ou «Mon père raconte». Le recueil s'ouvre sur un texte dédié à mon père et se termine par un texte dédié à ma mère. Vous évoquez votre enfance avec beaucoup de nostalgie. Regrettez-vous ce passé doux, candide et insoucieux ? Non, je ne le regrette pas. Quand je l'évoque, ce n'est pas la nostalgie qui prime mais la tendresse et l'insouciance des jours heureux mais aussi difficiles. Je voulais le faire revivre aux jeunes d'aujourd'hui. Il est vrai que l'insouciance, la candeur et la douceur le caractérisent, mais il n'a pas que ces aspects plaisants. Ce passé évoqué a aussi été dur pour l'enfant que j'étais, qui allait pieds nus à l'école, ne mangeait pas toujours à sa faim et qui a vécu de terribles frustrations à cause du manque d'argent pour s'acheter des livres ou des bandes dessinées qu'il aimait ou se payer une place de cinéma qui ouvre les portes du rêve. Que retenez-vous de votre enfance dans votre vie d'adulte ? Tout. «Le vert paradis des amours enfantines», comme le dit si bien Baudelaire. Notre jardin, une oasis dans l'oasis, la joie de la lecture, le bonheur du cinéma, l'image de mon père appelant du haut du minaret à la prière, et moi, à ses côtés, l'imitant, ma mère soignant avec amour ses fleurs au milieu desquelles elle était la plus belle. Mais aussi la joie d'aller à l'école, la passion de la lecture, les goûts incomparables des fruits et légumes que mon père cultivait dans notre jardin. Parlez-nous du titre. Pourquoi « … autres petits riens » ? Les petits riens sont des choses de la vie que chacun de nous possède, enfouis dans sa mémoire. Les petits riens font de nous ce que nous sommes. Ils nous marquent pour la vie. S'il y a de la légèreté dans le style et l'écriture des petits riens, en leur fond ils évoquent des choses sérieuses et graves. D'ailleurs, chacun des récits se termine par une hikma, une sagesse, véhiculant, sans paternalisme et sans moralisme aucun, des valeurs qui, à mes yeux, sont essentielles et que je voudrais partager avec les jeunes d'aujourd'hui qui ne sont pas allés à la même école, ni celle de la vie ni celle du savoir. Enfin, ce qui revient dans vos récits, c'est votre passion pour les bandes dessinées et le cinéma. Pas seulement. Pour la lecture aussi, la poésie, l'art, l'amour des belles choses, l'amour de la vie.