Critiques n L'ancien vice-président Dick Cheney, qui passait pour, peut-être, le plus secret de l'administration Bush, est devenu, aujourd'hui, le plus bruyant des détracteurs d'Obama. Rarement les historiens auront vu un ancien vice-président, si peu de temps après la passation de pouvoirs, s'en prendre au successeur de celui qu'il a servi, comme Cheney l'a fait jeudi, dernier. Celui qui jouait de son image de méchant et du surnom de Dark Vador, le chevalier noir de la «Guerre des étoiles», est de retour pour tenter de sauver l'empire Bush, ses politiques de sécurité nationale et ses pratiques antiterroristes. En pleine polémique, Barack Obama venait à peine d'achever un grand discours pour défendre sa jeune présidence et la décision de fermer Guantanamo que Cheney prenait la parole pour lui apporter la contradiction, la voix monocorde mais le verbe incisif. Il a parlé «d'indignation feinte» devant les méthodes autorisées par l'ancien Président George Bush pour faire parler les suspects de terrorisme et interdites par Obama comme des actes de torture ; il a parlé de «moralisme mensonger» ; il a accusé Obama de mettre la patrie en danger en fermant Guantanamo et en envisageant que ses prisonniers se retrouvent, libres ou enfermés sur le sol américain. Ces dernières semaines, celui qui passe pour l'un des grands inspirateurs des politiques de la présidence Bush, s'est érigé en dénigreur le plus virulent de la fermeture de Guantanamo ou de la publication de notes secrètes ayant fourni l'argumentaire légal aux méthodes d'interrogatoire de la CIA. Nombreux sont ceux qui se demandent ce qui motive cette débauche de publicité d'un homme qui ne semblait pas trop savoir quoi faire après avoir servi sous quatre administrations, sinon s'adonner à la pêche à la mouche et, peut-être, à l'écriture d'un livre. Pour ses proches, l'intérêt seul du pays anime un homme qui ne cesse de présenter comme la plus grande réussite de la présidence Bush, d'avoir empêché un nouveau 11-Septembre. Les anciens de l'administration Bush semblent ressentir durement un sentiment d'injustice, par exemple quand ils entendent Obama parler de la «colère» de certains Américains. «Pourquoi devrions-nous rester là à prendre des coups pendant des années», demande l'ancienne porte-parole de Bush, Dana Perino, «et quand nous nous défendons, on dit que nous sommes en colère !» Pour les républicains, le nouvel activisme de Cheney n'est pas sans soulever des questions. Il a beau s'être un peu refait dans les sondages depuis la passation de pouvoirs (37% d'opinions favorables en mai, 29% en janvier selon un sondage pour la chaîne CNN), il reste l'un des visages les plus impopulaires de la présidence Bush, et il est risqué de le laisser passer pour le porte-parole d'un parti qui essaie de se rétablir. Bush s'en tient à sa promesse de laisser Obama gouverner. Pour certains, le risque de poursuites judiciaires ne serait pas étranger à l'engagement de Cheney.