Phénomène n La commercialisation de la pièce de rechange contrefaite est en passe de devenir un véritable fléau dans la wilaya de Bordj Bou-Arréridj où l'on ne trouve plus de pièces d'origine tant le marché est inondé de produits dits taïwan. Selon le propriétaire d'une voiture de marque française à la recherche d'une paire de cardans d'origine, «il ne reste qu'une seule alternative : sillonner toute l'Algérie ou se rendre dans une casse auto, mais là encore, si tant est que la pièce est disponible, c'est le coup de massue question prix». Pour Mohamed Cheniti, un mécanicien diéséliste connu sur la place de Bordj Bou-Arréridj, «réviser un moteur, remplacer un roulement ou réparer une simple panne électrique nécessitant de changer une pièce usée, est devenu un vrai calvaire, aussi bien pour le propriétaire du véhicule que pour le mécanicien, surtout lorsqu'il s'agit d'une voiture européenne».Ce que ce «vieux routier» de la mécanique déplore le plus, c'est «cette propension des propriétaires à se rabattre, faute de mieux, sur les pièces de rechange de contrefaçon».Il ne s'agit pas simplement de pièces de mauvaise qualité, s'usant à la vitesse «grand V», mais aussi et surtout d'organes «extrêmement dangereux», en particulier «quand il s'agit de pièces liées à la direction, au freinage ou à la suspension du véhicule», affirme M. Cheniti qui cite l'exemple d'un véhicule qui a «perdu une roue, en pleine vitesse, à cause d'une fusée de roue importée d'un pays asiatique».La contrefaçon est «le fléau de la mécanique actuellement, mais hélas, l'on est obligé de se soumettre devant l'indisponibilité d'un disque d'embrayage ou de plaquettes de freins d'origine dans les magasins spécialisés», concède un autre automobiliste, chauffeur de taxi de son état. Alors qu'on reconnaît à la direction du commerce que la pièce taïwan est responsable de «10 à 20%» des accidents de la circulation, il y a encore des commerçants qui tentent de trouver une explication au phénomène de la contrefaçon. Saïd Hamdi, revendeur de pièces de rechange d'engins de travaux publics, soutient que les pièces d'origine «affichent des prix qui dépassent l'entendement». Un simple filtre à huile pour pelle chargeuse coûte parfois «1 000 fois plus cher lorsqu'il est d'origine, et je n'exagère pas», jure-t-il en prenant à témoin un client visiblement fatigué de «trimbaler» depuis un mois un coupleur de tractopelle. Oui, reconnaît, péremptoire, M. Hamdi, «nous écoulons de la pièce détachée dite taïwan et les clients sont bien obligés de l'utiliser devant l'indisponibilité ou la cherté de la pièce d'origine». Rencontré au niveau d'un garage de mécanique, le propriétaire d'une voiture Diesel de marque européenne affirme qu'après avoir fait monter une simple pompe d'huile contrefaite, il vient de «perdre le moteur». Un autre automobiliste indique, de son côté, que le «turbo neuf made in Taïwan de sa voiture, acheté 80 000 DA à Alger, n'a tenu qu'un mois alors que cette pièce est normalement usinée en Europe pour tenir cinq ans au moins». Un troisième client déclare, quant à lui, que ce qui lui est arrivé, il y a moins d'une semaine, alors qu'il se rendait, de nuit, à Alger au volant de sa camionnette, est «plus grave». Saci Benmaâmmar révèle que les deux ampoules «code-phare» de sa voiture se sont «brusquement éteintes en même temps», l'obligeant à s'en «remettre à Dieu» pour immobiliser son véhicule sans dommage qui roulait à 120 km/heure…