Spécificité n Al-Hammama, c'est là, le véritable coup de cœur des Blidéens. En effet cette spécialité culinaire de la Mitidja – ce plat ancestral – continue, aujourd'hui encore, à séduire de plus en plus de familles, en particulier durant le printemps. La ville de Blida, réputée pour ses roses, ses fameuses portes et ses places, compte aussi dans son riche patrimoine cette spécialité à base de couscous et d'herbes sauvages, qui s'ajoute à d'autres fiertés culinaires locales comme al-kassoul et le barkoukess ou encore les gâteaux traditionnels makrout et tcharak m'sakkar. Al-hammama peut contenir jusqu'à 70 variétés d'herbes de haute montagne, qui lui donnent d'ailleurs ce teint brunâtre qui la distingue. On y trouve de la lavande stéchade appelée aussi «lavande papillon» (el-halhal), du thym, du safran, de l'astragale, du genièvre ou encore des feuilles de mûres, de framboises, de cerises, de noix ou d'amandes. Ces herbes sont vendues dans les marchés de la ville par des herboristes, généralement des femmes, à des prix ne dépassant guère les 20 DA le bouquet. Hadja Aoueouache, une des dernières gardiennes des traditions des ancêtres, raconte la façon de préparer al-hammama «à la blidéenne», c'est-à-dire, explique-t-elle, un tantinet philosophe, comme au temps où la cohabitation simple, l'estime réciproque et la joie de côtoyer l'autre donnaient à la vie tout son sens et toute sa saveur. En plus du couscous et des herbes, deux autres plantes, chajrat Meriam et bounafaâ, constituent des ingrédients indispensables en raison des effets thérapeutiques qu'elles peuvent développer une fois bouillies et après avoir absorbé les saveurs des autres herbes cuites à la vapeur. Cette grand-mère, méthodique et perfectionniste comme le voulait son époque, insiste sur le fait qu'il faut bien laver les herbes à l'eau pure avant de les triturer et que le mélange ainsi obtenu, est ajouté au couscous, le tout assaisonné avec du sucre et de l'huile d'olive à servir de préférence avec du petit-lait. De son avis, il est conseillé de le consommer chaque matin à jeun, des jours durant, afin de faire profiter le corps de ses bienfaits. Ce plat, devenu par la force de la tradition, synonyme de printemps, est vécu comme un «événement» auquel la plupart des Blidéens se préparent. Et c'est dans une ambiance festive que les montagnardes partent chercher elles-mêmes les herbes nécessaires dans les bois puis entreprennent, une fois de retour chez elles, de préparer al-hammama en entonnant des chants traditionnels et en déclamant des dictons populaires, souvent de circonstance et capables parfois de déclencher ces rires hilarants qui, plutôt que de distraire, poussent à la tâche. Cela étant, en dépit du fait que ce plat soit disponible dans les marchés, au prix de 120 à 150 DA le kg, de nombreuses familles blidéennes procèdent elles-mêmes à sa préparation. Al-hammama compterait, à en croire les anciens, de nombreux bienfaits, étant donné qu'il contient «toutes les plantes et herbes naturelles à effets thérapeutiques sur diverses maladies, grâce à la lavande qu'il renferme et qui serait efficace contre certaines irritations», tout comme la plante appelée chadjrat Meriam dont les facultés intrinsèques favoriseraient aussi une meilleure circulation du sang dans l'organisme fatigué. Les plus sages ne manquent jamais d'avertir cependant qu'un avis médical est, dans tous les cas, vivement conseillé afin d'éviter d'éventuelles contre-indications, sinon de graves complications.