Près de 2 millions de diplômés cette année contre 63 en 1964, soit deux années après l'indépendance. L'Algérie peut s'enorgueillir d'avoir réussi à multiplier par 30 000 le nombre de lauréats enregistrés au lendemain du recouvrement de la liberté. Seulement 63 diplômés de l'université dans tout le pays qu'il fallait construire à partir de la base en commençant par instruire les citoyens et former une élite. L'instruction était donc le soubassement de toute entreprise d'édification, l'investissement dans cette action faisait partie des priorités. Seulement, l'élite n'a pas été préservée, les conditions n'ont pas été celles que les universitaires attendaient. Le savoir a pris le chemin des contrées plus propices à la recherche, mais aussi à la reconnaissance. Les «cerveaux» ont préféré déserter un terrain peu favorable, pour ne pas dire hostile. L'animosité est réciproque, pourrait-on dire, même si notre intention n'est pas de cacher les failles de l'université algérienne. Ceux qui, au fil des années, ont gouverné le pays ne se sont pas soucié de maintenir le rythme des préoccupations post-indépendance en garantissant tous les moyens nécessaires aux universitaires qui, eux, ont répondu par ce qui peut s'apparenter à de l'ingratitude. En faisant don de leurs connaissances à d'autres pays qui en ont largement profité, et en contribuant au progrès et au développement de ces derniers qui n'ont pas lésiné sur les moyens. Le jeu de la séduction a opéré dans ce cas et l'Algérie n'a pas su ou n'a pas voulu s'y mettre. Pendant que sous d'autres cieux on offrait aux universitaires algériens des conditions dont ils ne pouvaient rêver, les décideurs les ignoraient superbement. Le divorce était alors consommé, l'université n'aime plus l'étudiant qui le lui rend bien. Elle est d'ailleurs devenue une usine à fabriquer des diplômés, sans plus. Elle a perdu son âme, on aurait voulu l'étouffer qu'on ne se serait pas pris autrement. Un niveau qui dégringole, des enseignants préoccupés par des revendications socioprofessionnelles et des grèves dont ils se servent régulièrement pour se faire entendre. Deux millions de diplômés, cela signifie-t-il quelque chose dans le contexte qui perdure depuis des années ? Combien sont-ils à maîtriser une langue, mieux encore, à maîtriser leur spécialité ? De ces fournées qui sortent de l'université, très peu ont assimilé l'enseignement qui leur a été prodigué, malheureusement avec toutes les failles que l'on sait. Les autres s'estiment heureux d'avoir enfin réussi à quitter le campus où ils se sont éternisés. Les exemples sont donnés chaque jour, dans tous les domaines (hôpitaux, travaux publics et autres) et les erreurs commises ne se comptent plus. C'est une réalité qu'il faut admettre et il est plus que temps de remédier à cette situation.