Longtemps les arts et les métiers ont été sous-estimés en Algérie alors qu'ils sont pourvoyeurs de richesses. Les jeunes leur ont tourné le dos croyant même qu'ils sont dévalorisants. Il aura fallu un travail de longue haleine, de la part des autorités concernées, pour valoriser ces métiers et pour inciter les jeunes, notamment les recalés du système éducatif, à se retourner vers la formation professionnelle pour s'assurer un avenir dans un métier d'artisanat ou autre. Aujourd'hui, les fruits commencent à être récoltés et les résultats apparents, notamment pour l'artisanat. Car, de plus en plus de jeunes et même de moins jeunes, des hommes et des femmes s'inscrivent au niveau des établissements de formation implantés à travers le territoire national pour permettre le rapprochement. Les statistiques montrent l'intérêt aujourd'hui sans cesse croissant pour les métiers de l'artisanat. Les chiffres font état de plus de 500 000 artisans inscrits au registre du commerce. Un engouement est enregistré puisque le nombre d'emplois créés dans cette activité est passé de 178 000 en 2003 à plus de 525 000 artisans à la fin du mois d'août dernier. Il n'y a qu'à voir le nombre de visiteurs au Salon international de l'artisanat traditionnel (Siat), des jeunes en majorité, à la recherche d'opportunités d'emplois et même de formations, qui se déplacent pour s'informer et trouver des réponses à leurs interrogations, notamment concernant les débouchés de ces métiers. Des organismes d'accompagnement et de financement étaient aussi au rendez-vous de ce carrefour d'échanges qui démontre la richesse de l'artisanat national et surtout la réussite de jeunes dont la volonté et la persévérance ont fini par payer. Des jeunes qui ont même réussi à créer des entreprises d'artisanat dans le tissage, le cuivre, la bijouterie, le cuir...et à créer des postes d'emplois. Le secteur de l'artisanat connait donc un grand essor où des efforts sont faits pour le propulser à la place qui lui revient mais où beaucoup reste à faire pour atteindre les objectifs, considérant les difficultés rencontrées par les artisans. L'une des plus importantes, et qui revient toujours, demeure l'écoulement du produit. Les artisans ne trouvent pas assez d'espaces pour commercialiser leurs produits. D'où la multiplication des foires afin de les aider à les écouler. Un autre problème reste celui de la matière première. Beaucoup d'artisans se plaignent du mal à s'approvisionner en matières premières, notamment le corail pour les bijoutiers, le cuir etc. Mais les autorités concernées s'attellent à trouver des solutions pour dénouer ces difficultés à même d'encourager les artisans à perpétuer cet art ancestral qui se transmet de génération en génération et qui reflète le génie de tout un peuple. L'innovation pour imposer le produit Outre ces difficultés, la pénétration des marchés extérieurs est aussi un autre problème qui vient allonger la liste déjà évoquée. Des expositions à l'international ont déjà été organisées et le produit national artisanal connaît un engouement et attire beaucoup d'acheteurs, notamment pour les bijoux. Mais pour certains produits, il y a lieu de travailler davantage sur le design. Pour cela, l'Algérie a bénéficié d'un programme P3a pour l'amélioration du produit artisanal national qui a besoin aujourd'hui d'être certifié. Les différents responsables qui se sont succédé à la tête de ce département ministériel ont insisté sur l'importance d'aller vers un produit innovant et compétitif. Cela ne peut se faire sans l'incitation des artisans et l'encouragement des talents. Un travail entre artisans et designers est aujourd'hui une nécessité si l'Algérie veut développer davantage son produit et le placer sur les marchés mondiaux. Adapter le produit artisanal aux standards internationaux d'esthétique et de qualité est le cheval de bataille des autorités concernées. La directrice générale de l'Agence nationale de l'artisanat traditionnel (Anart), Mme Faiza Barchiche, a déclaré, dans un entretien accordé à un confrère, que l'Algérie participe depuis déjà trois années au Salon de Villepinte à Paris, de renommée mondiale. Et à chaque occasion, «nous rencontrons un franc succès sur le produit algérien et surtout sur le produit qui est fait en binôme entre artisans et artistes designers. Nous avons bien compris que, maintenant, le produit doit obéir à des normes, à des lois, à des certifications et des labellisations. C'est donc cette dynamique que nous menons et que nous souhaitons inscrire dans la durée». En 2013, et toujours selon cette responsable, l'Anart a initié, suite à un programme arrêté avec le ministre du Tourisme et de l'Artisanat, trois ateliers sur le tissage, la céramique et le verre. Un travail qui se fait entre les artistes designers et les artisans. L'objectif de ces ateliers est d'arriver à créer des binômes pour développer le produit afin de le mettre au goût du client et du marché ainsi que de la demande intérieure et extérieure. Il s'agit, bien entendu, d'arriver à l'excellence. Nous avons un savoir-faire et nous allons le conjuguer avec le savoir pour obtenir des résultats substantiels. Il devient aujourd'hui fondamental, de l'avis de Mme Barchiche, «de travailler de manière réfléchie avec une stratégie adaptée dans le marketing, le packaging et, évidement, sur la qualité du produit. Toutes ces actions s'inscrivent dans le respect des exigences d'authenticité et d'innovation». Il y a lieu de souligner que le secteur de l'artisanat a généré plus de 211 milliards de dinars comme produit sectoriel brut. Le développer devient une nécessité absolue. B. A.