La Russie, en accordant à l'Arménie une ristourne considérable sur le prix du gaz, a affiché les avantages immédiats qui attendent l'Ukraine, en grandes difficultés financières, si elle revenait plus franchement dans son giron. Dès septembre, les autorités d'Erevan, tentées un temps par le Partenariat oriental proposé par Bruxelles, avaient annoncé leur revirement, préférant une intégration prochaine à l'Union douanière mise en place par Moscou, avec le Kazakhstan et le Bélarus. L'Arménie en a vu les bénéfices lundi à l'occasion d'une visite du président russe Vladimir Poutine. Cette ex-République soviétique du Caucase achètera désormais son pétrole en Russie sans les droits de douane de 30% qui existaient jusqu'à présent, et ses équipements militaires au prix du marché intérieur russe. Surtout, Erevan paiera son gaz 189 dollars le millier de mètres cubes, en vertu d'un nouveau contrat courant jusqu'en 2018. «Rendez-vous compte, en Europe le prix est à près de 500 dollars», a souligné M. Poutine. Un tel avantage a de quoi faire rêver l'Ukraine, qui règle son gaz à un prix parmi les plus élevés comparé à ceux appliqués aux autres pays européens, et dont 60% de la consommation est encore assurée par la Russie, malgré des investissements massifs pour stimuler sa propre production. Une ristourne similaire représenterait des milliards de dollars d'économies pour l'Ukraine, au moment où elle traverse une grave crise financière, avec un fort déficit public et des réserves de devises étrangères qui s'effondrent. Concrètement, cela signifie que cette autre ex-république soviétique, que les agences de notation jugent déjà peu solvable, risque d'être dans l'incapacité de rembourser ses emprunts ou de régler sa facture gazière. Après le refus de Kiev de signer un accord avec l'UE, la compagnie russe Gazprom a décidé de laisser à l'Ukraine jusqu'au printemps pour payer son gaz consommé entre octobre et décembre, selon l'opérateur ukrainien Naftogaz. En l'absence de liquidités, ce pays peut aussi se retrouver acculé à une dévaluation potentiellement très douloureuse pour la population. Malgré l'aggravation de la situation, le pouvoir ukrainien refuse les conditions draconiennes (restrictions budgétaires, hausse du prix du gaz) posées par le Fonds monétaire international pour lui verser une aide de plusieurs milliards de dollars promise en 2010. Le président ukrainien, Viktor Ianoukovitch, a indiqué que Kiev avait besoin d'un «programme d'aide financière et économique» de l'UE avant de signer tout accord avec elle et qu'il se rendrait à Moscou dans les jours qui viennent pour discuter coopération économique. L'hypothèse d'un prêt russe revient donc au premier plan. L'UE n'a pas proposé d'aide financière directe à l'Ukraine, mais souligne qu'elle sortirait gagnante de la création d'une zone de libre échange dans laquelle plus de 98% des droits de douane seraient supprimés, ce qui représenterait 487 millions d'euros par an pour les seules exportations ukrainiennes. La Russie, qui absorbe à elle seule le quart des exportations ukrainiennes, a en outre fait miroiter une relance des relations commerciales, synonyme de bouffée d'air frais pour l'Ukraine, en récession depuis plus d'un an. Agences