Le génocide mené avec constance par Israël à Ghaza révèle encore une fois ce que peut faire la communication en temps de guerre pour s'inscrire, selon les cas, en acteur engagé, comme observateur plus ou moins objectif, plus ou moins respectueux de l'éthique professionnelle, plus ou moins partisan d'une politique menée, etc. Dans la situation actuelle, caractérisée par une féroce agression contre la population de Ghaza, martyrisée chaque minute, les Algériens n'ont que l'embarras du choix. Dans le pays le plus parabolé du monde, les citoyens, toutes tendances politiques confondues, regardent tout ce que «l'assiette» capte et transmet. Que ce soit en arabe, en français, en berbère et en d'autres langues, on zappe pour suivre ce qui se passe en Palestine et essayer de trouver un sens à des déplacements diplomatiques, qui sont autant de plages horaires octroyées à Tel-Aviv pour achever «le travail». Ce dernier concept est scotché dans la bouche de journalistes et commentateurs, dont un grand nombre passe de média en média, pour assurer le «service après-vente» des opérations criminelles menées par l'armée sioniste. Certains étonnements du microcosme algérois, devant le traitement informatif appliqué à l'invasion de Ghaza, semblent émaner d'âmes simples, de naïfs, qui croient trop souvent que tous les médias sont libres en Europe et que toutes les ONG (dont certaines se sont volatilisées depuis l'attaque israélienne) sont indépendantes là-bas. C'est ainsi qu'au pays des droits de l'Homme, les médias ont été les premiers à perdre la bataille de Ghaza. Là où il y a des femmes, des hommes, des partis et des associations qui ont dit haut et fort leur rejet de l'arrogance et de la violence de l'Etat hébreu, les TV se sont couchées trop tôt en essayant de retrouver un semblant de professionnalisme, le 9 janvier, après l'abstention des Etats-Unis à l'ONU le 8 janvier. La politique de Tel-Aviv, son mépris absolu des résolutions de «la communauté internationale», les crimes contre l'humanité et le racisme affiché par les dirigeants juifs ont été, sont et seront intouchables pour la majorité des médias en Europe. Les voix discordantes, elles existent dans la presse écrite, les partis, les associations, sont systématiquement occultées sinon diabolisées. Un comique comme Dieudonné est devenu une affaire d'Etat car il a eu l'outrecuidance, pour un artiste, de se moquer d'Israël dans une parodie qui ne «casserait pas trois pattes à un canard». Le lobby sioniste veille au grain et ne laisse rien passer et on mobilise, si nécessaire, un chanteur de troisième zone comme Enrico Macias qui, avec l'âge, ne sent plus que le racisme abject. Les roquettes du Hamas deviennent des missiles intercontinentaux qui donnent à voir avec complaisance les bunkers trois étoiles des villages israéliens frontaliers avec Ghaza. Celle-ci est dite par des présentateurs de JT serviles dont l'alibi est l'impossibilité de pénétrer dans Ghaza. Mais qui envahit cette ville et empêche les médias de voir les massacres ? La preuve est faite pour la centième fois. La fracture, profondément travaillée par Israël, s'élargit entre les opinions arabes et les médias dominants d'Europe. En effet, avec le soutien logistique de ces médias, Israël fait des économies et n'a nullement besoin d'investir dans de grandes chaînes TV pour dire sa parole au monde, aux Arabes. D'autres s'en chargent, même si le prix risque, à terme, d'être plus élevé. Ce qui amène sur le tapis la question posée aux dirigeants arabes quant à l'absence de volonté et d'ambitions pour asseoir de grandes chaînes d'information satellitaires de qualité, professionnelles et présentes partout. A part Al Djazeera, qui porte au loin les politiques arabes là où il y en a. La presse algérienne, dans la guerre menée par Israël, a fait un remarquable travail. A travers la dizaine de quotidiens qui comptent, les Algériens ont eu accès à de l'information, des commentaires, des analyses qui dénoncent les crimes racistes d'Israël. La qualité du travail réalisé chaque jour aura permis de mettre en relief l'alignement et la duplicité de nombreuses chaînes européennes qui ont perdu encore une partie de leur âme et de leur crédibilité, au même titre que certaines ONG plus que sélectives lorsqu'il s'agit d'Israël. La TV, en temps de guerre, ne dit pas forcément la vérité. Elle peut être une arme qu'il faut apprivoiser pour de justes causes. A. B.