Que de moments forts a abrité la salle Harcha-Hassen depuis le 16 janvier ! Dès le début de la compétition et jusqu'au sacre du sept national, la salle n'a pas désempli. La compétition africaine a drainé grande foule comme aux beaux jours du handball algérien. De jour en jour le public se faisait plus nombreux et les 8 000 places que comptait la salle se révélaient insuffisants pour abriter les matchs d'un tel évènement. Le jour des finales, le public qui se faisait rembarrer aux abords de Harcha s'est présenté très tôt. Il était 8h quand on se bousculait déjà devant les portes. Le service de sécurité très dépassé les 10 premiers jours de la compétition a bouclé les rues qui mènent à la salle. Un dispositif anti-émeutes sécurisait les abords de la salle. Il était évident que l'on craignait un débordement des supporters qui se sont déplacés en grand nombre et dont la majorité n'a pas eu la chance d'accéder à l'intérieur de la salle. L'accès gratuit à cette 21e CAN de handball a démultiplié l'affluence du public. On pouvait facilement atteindre les 10 000 personnes à l'intérieur en ce samedi. Mis à part le premier match de classement entre les Algériennes et les Angolaises où l'on voyait encore des tribunes libres, les trois autres matchs affichaient salle archicomble. En attendant la finale messieurs prévue pour 18h15, le public ne se faisait pas prier pour apporter son soutien aux autres équipes tour à tour. De la sélection nationale algérienne dame, aux Angolais messieurs et jusqu'aux filles tunisiennes, les différentes équipes qui ont évolué hier à Harcha ont eu droit à un soutien spécial chacune. Des encouragements ponctués à chaque fois par les célèbres one, two, three, viva l'Algérie qui rappelaient que l'on était ici avant tout pour soutenir l'EN. Le public présent, dont un bon nombre de supporters du Mouloudia d'Alger communiquait les résultats du match de la 1/8e de finale de la Coupe d'Algérie de football en entonnant des chansons de leur riche répertoire. Ainsi à Harcha, on pouvait savoir que le Mouloudia était d'abord mené au score face à l'US Chaouia avant d'égaliser et se qualifier aux tirs aux buts aux quarts de finale de la Coupe d'Algérie. La joie des supporters n'en fut que plus grande et elle se faisait entendre aux quatre coins de la salle. Les Tunisiennes coqueluches de la journée L'annonce de la finale dame et l'entrée de la sélection nationale tunisienne féminine sous les ovations de Tounes, Tounes, Tounes scandés en cœur par le public, laissait croire que la salle a été subitement envahie par les voisins tunisiens. Le sept féminin tunisien qui n'a plus revu le sacre africain depuis 1976, voulait tellement gagner cette coupe qu'il n'a pas manqué de demander ce soutien au public. Charmeuses, les coéquipières de Toum ont lancé des roses au public pour le remercier pour ses soutiens précédents et pour réclamer un ultime soutien. Totalement séduit, le public a redoublé d'efforts. Les Tunisiennes avaient l'impression de jouer chez elles. Les coéquipières de Raja Toumi, portées par un public algérien exalté, ont fini par avoir raison des valeureuses congolaises qui disputaient leur toute première finale africaine. Une fois que le sifflet de l'arbitre a retenti, consacrant les Tunisiennes championnes d'Afrique, le public accompagnait leur joie avec des ya chaba, ya chaba, ya chaba, ya tounsia sur l'air de la célèbre chanson de Khaled Hadj Brahim ya chaba, ya chaba, ya chaba bent bladi. L'osmose avec le public n'en était que plus parfaite. Les Tunisiennes ont dansé longtemps sur le parquet flambant neuf de Harcha avant de se retirer pour laisser la place aux garçons. Une finale historique allait s'y dérouler. Les champions en titre africains battus par... le public et Slahdji Aussitôt que les sélections féminines finalistes ont quitté le terrain, la sélection algérienne a fait son apparition sous un tonnerre d'applaudissements nourris. A l'unisson, hommes, femmes et enfants scandaient les Algériens, les Algériens... ponctués par des applaudissements qui faisaient vibrer les quatre coins de la salle. Les Tunisiens, qui avaient les faveurs du public le long du tournoi, ont été accueillis pour la première fois par des sifflets à rendre sourds les présents. Désormais ils savaient à quoi s'en tenir tout le long des soixante minutes que dure une partie de handball. Si le sept national n'a pas démérité sa victoire, il sait au moins à qui il la doit. Le public les a porté le long du match. Il a sifflé toutes les attaques des Tunisiens permettant à l'extraordinaire gardien algérien Abdelmalek Slahdji de faire des arrêts époustouflants qui ont permis au sept national de creuser la distance avec l'adversaire. Sur le refrain de la dernière chanson de Khaled, le public chantait des inoubliables jouez, jouez, on va gagner, championi la la la la la... Quand les encouragements du public baissaient d'intensité, les coéquipiers de Berkous les réclamaient ouvertement. Les supporters ont su donner des ailes à une sélection nationale qu'aucun pronostic ne prédestinait à cette septième étoile africaine. A la fin de la partie, mis à part les médias et le public tunisien, tous les présents à Harcha, presse étrangère comprise, étaient derrière les handballeurs algériens. L'euphorie était totale. Les camarades du Tunisien Issem Tedj ont fini par comprendre qu'ils ne pouvaient rien contre cette complicité entre le public et les handballeurs algériens. Ils n'auront pas leur troisième titre consécutif. Le public de Harcha et Slahdji en ont décidé autrement. Les Algériens ont volé ce soir-là très haut dans le ciel étoilé d'Alger. L'hymne national entonné en cœur par les 10 000 spectateurs donnait la chair de poule. La désorganisation, le point noir de la 21e CAN La merveilleuse victoire du sept algérien ne sera pas l'arbre qui cachera la mauvaise organisation du tournoi. Tous ceux qui fréquentaient la salle Harcha ces 10 derniers jours pouvaient constater qu'on était encore très loin d'organiser une compétition de haut niveau. Si le président du Cocan, Saïd Bouamra, a affirmé la veille de la tenue de cette 21e CAN ses appréhensions en déclarant que l'Algérie n'était pas prête, le ministre lui n'est pas resté modeste. Il a déclaré à la presse sportive, qui a rapporté ses propos, que l'Algérie était en mesure d'organiser une Coupe du Monde de handball. Les faits étaient-là pour battre en brèche ces prétentions démesurées. L'organisation de cette 21e CAN ou sa désorganisation en était la belle preuve. De l'absence d'affiche annonçant qu'un évènement de cette dimension se déroulait en Algérie, au service d'ordre, à l'intérieur et à l'extérieur de la salle, totalement dépassé par la foule nombreuse de spectateurs qui se présentaient aux portes de la salle quotidiennement, tout criait l'anarchie. Les délégations sportives, le public et la presse étaient quotidiennement soumis à rude épreuve pour accéder à l'intérieur. On a même frôlé le pire avec le bus de l'équipe égyptienne pris-à-partie aux abords de la salle par un public en colère. Il a fallu attendre le dernier jour de la compétition pour avoir une entrée séparée du public à travers le complexe sportif de Ghermoul. Quand aux représentants des télévisions détentrices des droits de transmission de cette CAN, le calvaire a duré jusqu'au bout. Ils ont peiné pour faire respecter leur exclusivité. Les caméramen des télévisions privées algériennes, qui n'ont acheté aucun droit même pas ceux des résumés, ignoraient visiblement qu'ils n'étaient autorisés à filmer qu'en zone mixte. Rappelés à l'ordre, ils ne voulaient rien entendre. Ils ont passé le clair de leur temps à jouer au chat et à la souris avec les détenteurs de droits exclusifs. Le service d'ordre à l'intérieur de la salle refusant de les seconder, ils ont dû s'adresser au président du Cocan pour arracher une collaboration parcimonieuse des policiers. Il était évident qu'on avait encore beaucoup à apprendre pour pouvoir organiser une compétition sportive internationale. Et ce n'est, certainement pas en abritant une CAN tous les 14 ans qu'on pourra se parfaire. La réconciliation égypto-algérienne dans une...salle de handball La 21e CAN de handball a aussi marqué les esprits par des points positifs. Les Algériennes, qui ont déserté longtemps les salles de handball, ont fait un come-back remarquable durant ce tournoi. La gent féminine, l'espace d'un tournoi international, a retrouvé le chemin des salles. Et ce n'était pas qu'un public initié. Jeunes et moins jeunes, les femmes ont investi Harcha pour rappeler que ces espaces étaient aussi les leurs. Le spectacle sportif était redevenu une attraction familiale. Beaucoup de familles se sont déplacées ensemble et en grand nombre. Même les bébés avaient leur place à cette fête du handball africain. Le retour en force de la gent féminine s'est accompagné aussi d'une réconciliation sportive. Les Egyptiens qui ont subi une hostilité manifeste du public tout le long de cette compétition, ont clôturé la soirée de samedi par une bonne impression. Après avoir été hués, sifflés et invectivés par le public durant le match de classement qui les a opposés aux Angolais, ils ont eu une première explication avec le public lui intimant doigt sur les lèvres de se taire et de reconnaître le mérite de ceux qui venaient d'arracher le troisième billet pour le Mondial de Doha 2015. La réaction du public n'en était que plus farouche. Il les a éconduits aux vestiaires sous les insultes et les jets de bouteilles, oranges, pommes et autres projectiles qui leur sont tombés sous la main. Mais cette hostilité qui a entaché aussi, le match Algérie-Maroc, a fini par fondre comme neige au soleil en fin de soirée. Lors de la cérémonie de remise des médailles et trophées, le sept égyptien accueilli par les harami, harami a su amadouer le public. Les embrassades et étreintes entre les joueurs algériens et égyptiens ont baissé le degré d'animosité dans la salle. Quand les amis du brillant Zein sont montés sur le podium en applaudissant le public qui leur faisait face, ces derniers ont fini par sacander le nom de l'Egypte alors que l'autre moitié de la salle refusait encore la réconciliation en scandant des Ulach al smah ulach. Une fois les médailles remises, les joueurs égyptiens se sont dirigés vers la partie de la salle qui leur était encore hostile, les applaudissant, leur envoyant, maillots, gants et fanions. Cette insistance du team égyptien a fini par avoir raison de la hargne que le public gardait depuis les éliminatoires de la Coupe du Monde 2010. Au bout de quelques instants, le public de Harcha enivré par la victoire des Algériens, scandait en cœur des Masr Masr Masr...entrecoupés d'applaudissements. L'espace d'un moment, on aurait cru être au Cairo Stadium. C'est dire que l'esprit sportif a fini par triompher. Les sportifs ont réussi là où les politiques ont échoué. G. H.