A. Lemili L'hôtel Hocine, à Ali-Mendjeli, a accueilli au cours de la matinée d'hier, une rencontre des plus riches en informations sur la dernière crise autour du lait et ses dérivés. Plateau des intervenants très relevé et pour cause leur implication directe et surtout le poids des organismes qu'ils représentent dans tout ce qui touche à l'industrie agroalimentaire sur le plan générique et le lait plus en détail. Organisée par la fondation Filaha Innove, la manifestation aura donc réuni des représentants des pouvoirs publics et des professionnels et/ou producteurs versés directement dans les activités sectorielles et aura surtout permis, entre autres sujets abordés, de mieux comprendre et expliquer officiellement la récente pénurie de lait sur l'ensemble du territoire national ainsi que l'augmentation du reste des produits dérivants. Tour à tour, MM. Bensemmane, Benchekor, Hadj Henni, Nekkab, Idres, respectivement président de la fondation, président du Comité interprofessionnel du lait et des produits laitiers, expert en valorisation des produits agricoles (la production laitière et le dilemme de la poudre de lait), directeur de développement à l'Onil (l'appui aux élevages et la production laitière), docteur (la filière avicole et viande : état des lieux, biosécurité et charte sanitaire), ont dans leur intervention confirmé quelque part la corrélation entre les éléments naturels constitutifs du monde agricole et aussi leur interdépendance dès lors que ces éléments se rejoignent sur le plan agroalimentaire. Dans cet ordre d'idées et en marge de la rencontre, M. Sefari Med, directeur général, expliquera que la récente tension sur le lait est due, au-delà de l'augmentation subite de la poudre de lait sur le marché international, à un autre ensemble de facteurs a priori très terre-à-terre aux yeux du profane et lesquels pourtant expliquent de manière très rationnelle la crise en question. Ainsi pour notre interlocuteur : «Paradoxalement, la flambée des prix sur le marché mondial de la poudre de lait a coïncidé avec la dévaluation du dinar, ce qui du coup a conduit à une modification de la consommation chez un nombre important de nos concitoyens habitués à l'achat de produits laitiers sous une autre forme, qu'ils soient en poudre ou en liquide mais dont parfois le prix a drastiquement augmenté. Conséquence, ces derniers ont donc opté pour la consommation du lait en sachet, saturant de fait le marché par une demande supplémentaire non prévue. Autre facteur, les laiteries privées locales, qui avaient pour habitude de fabriquer les produits dérivés à partir d'une poudre de lait importée parce que l'Etat ne subventionne pas des achats destinés aux produits dérivés du lait, ont constaté qu'il leur revenait nettement moins cher d'acheter le lait produit en Algérie. Et contrairement à ce que l'on pourrait penser, cela relève de leur droit, la démarche est tout à fait légale. Mieux encore et j'assume mes propos, l'augmentation des prix des légumes secs, je vous citerais les haricots, a également influencé les habitudes de consommation des Algériens et pesé sur ladite crise du lait. Au jour d'aujourd'hui, le kilogramme de haricots est de 300 dinars sans pour autant que cela arrive à nourrir une famille nombreuse. Or, et je ne vous apprends rien, bien des foyers se sont retrouvés à modifier la nature de leurs repas en substituant la consommation de légumes secs à des pâtes au lait. Ce sont-là des facteurs qui peuvent paraître au citoyen lambda comme ‘'tirés par les cheveux'' mais néanmoins plausibles et surtout effectifs.» L'autre argumentaire quant à la crise sera, ensuite et en raison de la psychose installée, le surstockage par les ménages des sachets de lait, une attitude qui va énormément contribuer à donner plus d'ampleur encore à la tension laquelle devra, et c'est par ailleurs le cas actuellement, retomber une fois cette psychose passée et les capacités de stockage des consommateurs saturés. Des explications confirmées en partie par le directeur du développement de l'Onil, quoique celui-ci éludera les questions sur l'absence de lisibilité, par l'organisme qu'il représente, des frémissements du marché en ce sens et par voie de conséquence de la maîtrise technique et commerciale de l'office. Il y a lieu toutefois de souligner que si son intervention aura été claire, limpide et surtout précise en matière de chiffres et statistiques mais tout aussi en commentaires, M. Nekkab sera interpellé par le représentant de la laiterie Soummam, qui démontera tout de même des vérités trop vite assénées comme la proximité de l'Onil des laiteries qui font l'appoint des besoins nationaux en prenant initialement en charge notamment le paiement des avances faites aux éleveurs et collecteurs mais sans pour autant qu'eux-mêmes soient régularisés par l'office. «Nous détenons des créances de 24 mois sur l'Onil alors que la convention signée par les différentes laiteries et plus particulièrement l'article 7 évoque une marge qui ne dépasserait pas trois mois», nous dira M. Saadi, représentant de Soummam. A. L.