La tension sur le lait en sachet était au centre d'une conférence organisée, hier, à Constantine par la fondation Filaha.Un débat entre professionnels, cadres et ingénieurs agronomes qui a permis de faire le point sur ce problème d'actualité qui continue à préoccuper les citoyens. Et même si les avis étaient partagés sur l'origine ou sur la portée de cette crise, les intervenants ont toutefois estimé qu'elle n'est que provisoire, et ont jugé que la seule solution pour venir à bout de ces pénuries à répétition de produits de première nécessité est d'encourager la production locale. Ainsi, le président du Comité interprofessionnel du lait (CIL), Mahmoud Benchekor, a observé que même si l'Algérie importe chaque année 30.000 vaches laitières, cela reste insuffisant pour couvrir les besoins du marché en raison de la désorganisation qui caractérise tout le réseau (producteurs, collecteurs et laiteries). Il a insisté sur le fait que l'Algérie, qui consomme annuellement entre 3,5 et 4 milliards de litres de lait, a les moyens de couvrir ses besoins : « Une vache produit environ 6.000 litres de lait par an, donc le pays a besoin d'environ 800.000 vaches laitières. Mais auparavant, l'Etat doit faciliter la tâche aux investisseurs comme il faudrait aussi encourager la production fourragère, le maïs notamment, au sud du pays ». Pour sa part, le directeur du développement de l'Office national interprofessionnel du lait (ONIL), Djamel Nekkab, a indiqué que les laiteries ont été suffisamment dotées en poudre de lait et leur quota habituel a été respecté. « Ce qu'il faut savoir c'est qu'en cette période de l'année, la production est en basse lactation, mais cela n'explique pas tout, car la pression sur le produit et le faible rendement des vaches ont fait qu'il y a une combinaison de conjoncture qui a mené à la crise actuelle. La psychose qui s'est installée ces derniers jours est pour beaucoup dans la perturbation du réseau de distribution, cela sans parler de la spéculation », a-t-il expliqué. Selon lui, les bateaux chargés de poudre de lait arrivent bientôt. Cette crise « va s'estomper dans les jours à venir », a-t-il affirmé Hadj Henni, membre de la fondation Filaha et expert en valorisation des produits agricoles, a, pour sa part, affirmé qu'il faudrait mettre un terme au gaspillage des ressources en eau, des terres agricoles et des produits laitiers pour inculquer à la population une nouvelle culture de la consommation (l'Algérien consomme 145 litres de lait, un Marocain moins de 80 litres). Il a réclamé aussi de réviser l'organisation de la filière et d'écarter les personnes qui n'ont aucun lien avec l'activité. Et s'il considère que la perturbation dans la production du lait en sachet n'est que provisoire, il a estimé qu'une telle conjoncture est une occasion pour lancer de nouvelles réformes. « L'Algérie a surmonté les crises des années 1970, 1980, 1990, à présent les choses se sont nettement améliorées mais l'Etat ne peut pas subventionner ces produits continuellement, c'est juste conjoncturel et c'est pourquoi il nous faut une prise de conscience », a-t-il signalé en notant que le cours mondial de la poudre de lait a grimpé, ce qui a naturellement affecté et perturbé le marché local. « Il faudrait changer les choses, à commencer par la réévaluation de la monnaie et donc des prix des produits de base. L'augmentation du prix du lait en sachet est à mon avis inévitable à moyen terme, car 60% du lait est importé sachant que le lait représente 40% de la demande de la population en produits de base », a-t-il suggéré. L'Algérie importe pour 900 millions de dollars par an de poudre de lait, alors que pour les dix dernières années ,la facture était entre 3,5 et 4 milliards de dollars.