L'habit traditionnel algérien connaît depuis ces dernières années un réel intérêt de la part des responsables du patrimoine et des chercheurs qui ont pris conscience de l'importance de la mise en valeur et de la vulgarisation de cet aspect patrimonial dans l'ancrage de l'identité algérienne. C'est dans cet esprit qu'un centre d'interprétation du costume traditionnel national sera prochainement ouvert au public, a annoncé la direction de la culture de la wilaya de Tlemcen à l'APS. Cette nouvelle structure considérée comme étant un espace muséographique à vocation didactique implantée à l'intérieur du site historique d'El Mechouar a pour missions la valorisation de la culture matérielle et immatérielle liée au costume et à la parure algérienne sous toutes leurs formes. Il fournit les clés de compréhension de ce patrimoine culturel vivant en privilégiant la pluralité du regard anthropologique, historique et artistique, a-t-on expliqué. Ce centre d'interprétation du costume traditionnel (CIC) est la première institution muséographique entièrement dédiée aux arts algériens du costume, a-t-on indiqué. Son corpus se compose d'une sélection de quarante costumes traditionnels produits par les artisans des différentes villes et régions du pays. Il est précisé que le CIC s'articule autour de trois espaces principaux de la grande galerie du costume algérien située à l'intérieur des voûtes de la citadelle, ancienne bâtisse militaire de l'époque coloniale édifiée sur l'un des cinq palais zianides du Méchouar et offrant un périple inédit autour de quelques-uns parmi les costumes les plus représentatifs des traditions vestimentaires algériennes. Il compte également l'espace «Lebset El Arftan» situé dans la prestigieuse salle du conseil zianide du Palais royal. Il présente le costume traditionnel féminin Liménien devenu élément du patrimoine culturel de l'humanité de l'Unesco en 2012, lors de sa 7e session. Pour rappel, le dossier d'inscription a été fait sur la base de recherches historiques effectuées par des chercheurs de l'Ouest algérien, notamment de Tlemcen, Oran, Aïn Témouchent ainsi qu'un travail de proximité auprès des artisans spécialisés de Tlemcen, avait déclaré à l'époque Leïla Belkaïd, anthropologue. Il convient de souligner que le costume traditionnel autour duquel s'organise le rituel nuptial dit «El djli» s'appelle «Lebset El Arftan» ou par concision «Chedda» dont l'origine est algérienne et très ancienne. C'était une tenue, dit-on, portée par les princesses tlemceniennes à l'époque Zianide. Aujourd'hui, ce sont les mariées qui deviennent des princesses l'espace d'une soirée en portant cette tenue. Le costume de la mariée est constitué d'une robe en soie à manches larges constituées de tulle et agrémentées de perles, de paillettes et brodées de dentelles. La «Aroussa» est coiffée d'une «chechia» (coiffe conique). On ajoute une couronne en forme de cône brodé de fetla (fil d'or fabriqué à Tlemcen) appelé «Tedj» (qui signifie «couronne» en arabe). On couvre la partie basse de la couronne d'un collier d'or orné de pierres précieuses qu'on appelle Zerof. Puis s'applique sur le front le «Djbin» (diadème). Les grandes boucles d'oreilles perlées qui pendent latéralement sont appelées «El khorsa». S'agissant du vêtement, il est composé d'une longue robe en tissu fin et brillant que l'on appelle «R'da» (jupe). Ensuite autour de la taille une foutha «m'taqqla» (pagne) qui porte des rayures en soie dorée. Par-dessus ce vêtement, s'ajoute un caftan court travaillé avec de la fetla. Ce vêtement est garni de bijoux de perles qui viennent couvrir la poitrine de la mariée, appelés «Joher». À Tlemcen et Nedroma, le port de la chedda est une incontournable tradition, voire une véritable institution qui dépasse la notion d'habit d'apparat. L'espace «blousa» est le troisième. Il est situé autour du patio des princesses zianides du Palais royal du Mechouar. Il permet de découvrir la diversité d'une robe d'origine médiévale transformée par l'influence des modes européennes, symbole du costume féminin de toute l'Oranie, à travers les pièces uniques léguées par huit femmes d'exception, moudjahidate et artistes de différentes générations. Rappelons également que dans le but de promouvoir l'habit traditionnel et surtout dans la perspective, de préserver et de transmettre des savoir-faire séculaires qui tendent de plus en plus à disparaître, le ministère de la Culture organise depuis 2011, le Festival national de l'habit traditionnel, dont la dernière édition a été consacrée à la melhfa, magnifique drapé séculaire et costume encore vivant, dont les études anthropologiques font remonter à l'antiquité cet art du drapé algérien encore d'usage jusqu'à nos jours. S. B./APS