Le directeur de la recherche scientifique et du développement technologique au ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, le Pr Hafid Aourag, a indiqué, mardi dernier, au micro de la Radio nationale, que ces projets qui ont été menés dans le cadre de 34 Programmes nationaux de recherche (PNR), ont ciblés divers domaines allant de la santé à l'éducation en passant par l'habitat, le cadre de vie, l'environnement, l'hydraulique, l'agriculture, le nucléaire civil, la recherche spatiale et aéronautique, l'industrie, les énergies renouvelables... Lancés à partir de 2009, les travaux des quelque 22 000 chercheurs et 1 300 laboratoires de recherches engagés dans les PNR sont aujourd'hui bouclés et prêts à l'emploi. Des notes de présentation ont même été élaborées, sur une cinquantaine de pages, à l'adresse des institutions concernées dont 24 ministères impliqués dans les 34 PNR qui ont bénéficié d'un budget de 6 milliards de dinars (le financement concerne uniquement les frais de recherche, les travaux étant menés dans des institutions déjà opérationnelles). Pour illustrer l'apport de ces études, le Pr Aourag citera l'exemple d'un barrage à l'est du pays où l'eau avait pris une coloration jaunâtre. Les experts étrangers n'avaient pas réussi à déterminer la cause du phénomène. L'entreprise autrichienne qui avait pris en charge la construction du barrage, proposera l'épuration de son eau pour une facture de 3 milliards de dinars. Finalement, c'est un chercheur de l'université de Batna qui trouvera la solution. Un autre projet a porté sur la numérisation des hôpitaux. Une de ses applications a été testée au Centre anticancer Pierre et Marie Curie, qui a permis de calculer et programmer les doses de médicaments à délivrer dans chaque traitement pour chaque malade. D'autres projets se sont intéressés à la gestion des ordures ménagères, la violence dans les stades, la socialisation de la culture, l'utilisation de l'énergie solaire dans des équipements et machines pour l'agriculture dans le Sud. Mais ces 2 800 «solutions», dont 202 ont été brevetées, qui n'attendent que d'être appliquées et rentabilisées, sont pour l'heure mises en veilleuse. Car, les projets scientifiques doivent être d'abord examinés et validés par le Conseil national de la recherche scientifique et technique. Il faut donc attendre que le Premier ministre, qui préside le Conseil, se décide à convoquer la réunion devant donner son feu vert sans lequel les travaux des chercheurs ne pourront pas être transmis aux secteurs ciblés et concernés. «Nous avons fait notre travail», dira le Pr Aourag, la balle est maintenant dans le camp des décideurs, espérant qu'ils sauront la saisir au vol. Concernant l'intérêt purement scientifique des projets, le professeur dira que leur objectif n'était pas d'aboutir à des publications ou des thèses universitaires, mais à des résultats qui apporteront des solutions à des problèmes pour contribuer au développement du pays. Prenant l'exemple de son travail sur la matière et l'antimatière, qui lui valu une nomination au Nobel, évoqué par la journaliste, le Pr Aourag dira que «ce n'est pas le plus important. Ça n'apporte rien au développement du pays». «C'est une fierté pour l'Algérie, mais ça ne lui apporte rien», affirme-t-il, avec modestie. À ce propos, le responsable soutient que l'objectif est de hisser le niveau de l'enseignement universitaire et développer la recherche. «Avoir des Nobel comme enseignants ne veut pas dire qu'on aura le meilleur enseignement», affirme-t-il. Dans le même ordre d'idées, le Pr Aourag s'inscrit contre le «rapatriement» des chercheurs algériens qui travaillent à l'étranger. «Au contraire, je leur dit de rester là où ils sont et de faire bénéficier le pays de leurs compétences en contribuant au transfert de savoirs et de technologies», comme ils l'ont fait dans les PNR, aux côtés d'autres chercheurs étrangers. Au sujet de la place de la science et de la recherche scientifique au sein des institutions économiques, le professeur dira que les entreprises devraient accorder plus d'intérêt à la recherche-développement (R&D), et donc à la recherche scientifique. Les projets des 34 PNR devraient sans doute contribuer à la mise en place de la R&D dans le monde entrepreneurial. L'Algérie compte aujourd'hui quelque 30 000 chercheurs qu'il faut soutenir dans leurs travaux pour leur permettre d'apporter leur contribution au développement du pays. C'est en soutenant la recherche qu'on pourra augmenter le nombre de chercheurs, la qualité des travaux et la diversité des domaines qui en seront l'objet. Et la première action à mener, aujourd'hui, est certainement la validation des 2 800 projets pour que ceux qui y consacrent leur temps, leurs savoirs, leurs compétences, voire leurs moments de distractions et de vie familiale, puissent voir leurs travaux atteindre leurs objectifs. Car, la crainte que ces projets aillent rejoindre leurs prédécesseurs au fond d'un tiroir est toujours là. Les 34 PNR ne seront les premières victimes de la médiocrité, du laisser-aller et/ou de la bureaucratie, même, surtout oserions-nous dire, si on y a investi de l'argent, du temps et de l'intelligence et que leur apport soit prometteur. Car, il faut souligner que les problématiques susceptibles d'être sujets d'étude ont été établies par des commissions intersectorielles ayant réuni tous les secteurs socioéconomiques. Les contenus scientifiques des 34 PNR ont été élaborés par près de 500 experts avec la participation de tous les secteurs économiques ainsi que des chercheurs algériens exerçant au pays et à l'étranger. 3 998 soumissions de projets ont été proposées à l'examen de 15 organismes pilotes, qui ont eu à en évaluer la pertinence avant d'en retenir les 2 800 en attente d'être concrétisés, quand ce fameux Conseil national de la recherche scientifique et technique, opérationnel depuis 2008, finira de jouer à l'Arlésienne, comme l'a si longtemps fait la recherche scientifique. H. G.