Locaux, nationaux et étrangers, notamment les «nostalgiques de l'Algérie française» demeurent toujours attachés à Constantine, ou plutôt à son cœur battant : la vieille ville, Souika. Hélas, ce patrimoine architectural est grandement affecté par la dégradation du site et le laisser-aller, mais aussi en raison d'autres écueils : présence de commerces et habitations occupées. Mais la nouvelle feuille de route consignée dans les opérations de réhabilitation dans le cadre de la manifestation «Constantine, Capitale de la culture arabe 2015» ouvre des perspectives prometteuses, avec un dossier urgent doté d'un budget conséquent pour la restauration du vieux Constantine Il aura donc fallu attendre la manifestation culturelle de 2015 pour que Constantine soit mise sur la voie des opérations de réhabilitation de son patrimoine culturel. Il n'est jamais trop tard pour bien faire, diraient les plus optimistes. Dans le domaine du patrimoine, ce qui est perdu, l'est à jamais le plus souvent, répliquent les réalistes qui savent ce qu'est un chantier aussi délicat et fragile que cette casbah englobant divers vestiges et pans fragiles qu'il sera difficile, voire impossible, de reconstituer s'ils disparaissent. La ville entière est appelée à lifter ses pages d'histoire patrimoniale abandonnées faute d'une prise en charge réfléchie, et notamment en l'absence d'outils de sauvegarde convergents. L'élaboration des plans d'occupation des sols (POS) a toujours été la pomme de discorde entre les défenseurs du patrimoine et les collectivités locales. En experts, les premiers alertaient sur les atteintes au site dès lors que certaines «propositions sont loin de verser dans un plan d'ensemble tel que prévu par le Pdau (restructuration, réhabilitation) et ne respecte pas les dispositions de l'ordonnance 67-281». Les seconds prévoyaient une démarche qui permet «une intervention urgente de nettoyage du site permettant l'urbanisation future». Constantine revoit ainsi toute son image historique à la faveur de cette nouvelle ordonnance entrant dans le contexte de la manifestation de 2015. C'est une partie de la vitrine qu'on doit illustrer lors de cette manifestation pour refléter les ères ayant marqué la cité millénaire. Et c'est la raison pour laquelle toute une structure spécialisée de tutelle s'attelle à peaufiner «le vieux Constantine», affaibli par la négligence et les mauvais choix de départ dans les multiples opérations de lifting. Le spécimen de restauration de Mellah Slimane n'a pas donné l'effet escompté en la matière. Si ce n'est une expérience timide ayant débouché sur un résultat modeste. Seulement quelques bâtisses étaient «dépoussiérées» loin d'une mise en valeur exceptionnelle comme illustrée dans la maquette de départ. La vieille ville promise moult fois à un site touristique par excellence où les visiteurs devaient se bousculer en basse «Souika» a vu son héritage se détériorer progressivement. Les latences dans les études et notamment dans les applications des plans de réhabilitation adoptés diffèrent à chaque fois le démarrage des travaux. Au point que la médina perde de jour en jour une pierre de son ossature. «De 1980 à 1990 la vieille ville a perdu 40% des maisons. Dans le cadre du POS (plan d'occupation des sols) il est avéré que 54% des maisons sont démolies ou scellées, dont 11% sont squattées et seulement 8% sont en bon état», mentionne un rapport de réflexion détaillé (toujours d'actualité) émis par Mme Zoulikha Boumaza (architecte, sociologue enseignante à l'université de Constantine) dans une édition de la Revue algérienne d'anthropologie et de science sociales. Et tous les espoirs sont placés dans ce nouveau challenge en perspective de l'évènement de 2015 où sont attendues 18 opérations de réhabilitation des secteurs patrimoniaux protégés de Constantine, dont cinq zones relatives à la médina (Zaouias, Foundoks, hammams, mosquées, rues,...). En plus du site Tiddis à Beni H'midène et du tombeau de Massinisa au Khroub. Ce sont des opérations qui durent dans le temps et nécessitent beaucoup de talent et de maîtrise afin de ne pas affecter les espaces historiques, devenus fragiles. C'est l'aveu même des restaurateurs, bureaux d'études et collectivités locales. Un bon alibi pour dissimuler certains retards datant de la fin de l'année 2000. Période pendant laquelle les premières vraies projections sur la préservation du patrimoine prenaient forme, après quelques ambigüités de départ durant les années 80, mais la problématique enregistrée dans le premier plan de sauvegarde de la vieille ville et l'occupation du sol rendait la tâche alambiquée. «La complexité du site, juxtaposition de tissus et de monuments de plusieurs époques (hafsid, ottomane, française) et la dégradation avancée de certains quartiers (chara'a, souika) rendent ambiguë la notion de patrimoine. Dans un contexte où l'identité arabo-islamique est mise en avant, le devenir du site et des monuments est dès lors problématique», articule l'exposé. In fine, la médina devra patienter, et longtemps, pour recouvrer son image ancestrale. En dépit du budget alloué à ses mises en valeur et reconstitutions, la tâche ne sera pas aisée dès lors que les motifs «patrimoniaux» ont été effacés. Difficile récupération !