Contredisant ceux qui prônent une adhésion rapide à l'Organisation mondiale du commerce (OMC), des économistes, qui étaient hier les invités du forum d'El Moudjahid, ont soutenu le contraire. «L'Algérie n'est pas prête pour adhérer à l'OMC», a déclaré le conseiller du secrétaire général de l'Ugta (Union générale des travailleurs algériens) chargé des affaires économiques, Mohamed Lakhdar Badreddine. Lors de ce forum sur l'adhésion de l'Algérie à l'OMC, M. Badreddine a défendu la position de l'Ugta qui milite, a-t-il affirmé, pour les intérêts des travailleurs algériens et refuse que l'Algérie accède à l'OMC pour diverses raisons. L'intervenant a défendu sa position en affirmant que «les travailleurs algériens ne pourront jamais se retrouver dans une politique libérale. Si l'Algérie intègre l'OMC, nous risquons d'avoir des disparitions d'emplois, de nombreux travailleurs pourront perdre leur emploi». Pour étayer ses propos, il a évoqué l'exemple de la Tunisie qui, après avoir intégré l'OMC, a perdu près de 380 000 postes de travail dans l'industrie du textile. L'intégration de l'Algérie à l'OMC pourrait engendrer des crises sociales «graves» selon le conseilleur du SG de l'Ugta. M. Badreddine a indiqué qu'une éventuelle adhésion de l'Algérie à l'OMC entraînerait une hausse des prix, qui pourraient doubler. «Une fois que nous aurons adhéré à l'OMC, nous allons devoir appliquer les prix universels des produits et services, les factures sur le gaz, l'électricité, l'eau seront très chers pour le citoyen, même le prix du pain augmentera.» D'autre part, M. Badreddine a souligné que «ce n'est pas l'Algérie qui refuse d'adhérer actuellement à l'OMC, mais c'est cette dernière qui a imposé certaines conditions que l'Algérie n'a pas approuvé, des conditions telle que la suppression du soutien». «Ce qui intéresse les grandes puissances, ce n'est pas l'Algérie mais le marché de l'Algérie. Ce qui les intéresse c'est l'exportation aussi. Les grandes puissances ont souvent un surplus de production, elles veulent trouver des marchés où elles pourront l'écouler.» La question est donc, qu'est ce que l'OMC va apporter à l'Algérie, s'interrogea-t-il. Selon M. Badreddine, l'Algérie doit d'abord améliorer son économie et la rendre plus puissante et compétitive, et c'est seulement à ce moment-là que «nous pourrons discuter d'une adhésion de l'Algérie à l'OMC, car en ce moment nous n'avons pas les mêmes moyens que les pays européens». Il faut donc réhabiliter l'économie nationale et aller vers une économie puissante et de concurrence. De son côté, l'économiste Chafik Ahnine, dira que «la stratégie économique interne d'un pays détermine sa croissance et non pas une adhésion à l'OMC, nous devons donc d'abord améliorer notre économie et adopter des stratégies de développement durable et il faut adopter une meilleure politique industrielle». M. Ahnine dira encore qu'«il faut mettre en place une stratégie pour aller vers une économie puissante et compétitive» et qu'«on ne peut pas parler du développement durable sans parler aussi du développement des ressources humaines». Les invités du forum d'El Moudjahid ont aussi indiqué que si l'Algérie adhère à l'OMC, elle n'a pas de produits à défendre mis à part les hydrocarbures, sachant qu'il existe une concurrence économique féroce entre les grandes puissances adhérant à l'OMC. M. Ahnine a indiqué à ce sujet qu'«à cause de l'OMC, aujourd'hui ce n'est pas l'offre et la demande qui régulent le marché, mais c'est le diktat et le monopole de certaines puissances et certaines grandes entreprises. On ne peut pas parler de concurrence quand une seule entreprise prend le monopole d'un domaine ou d'un produit», a-t-il souligné. A. K.