Au-delà des objectifs réels de cette nouvelle posture du gouvernement et la façon dont le premier policier du pays compte faire participer la population dans la gestion des affaires dévolue aux élus locaux, il est utile de scanner un peu la situation au niveau local et voir comment pourrait se faire cette entreprise susceptible d'être très bénéfique pour la population. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, l'implication des citoyens dans la gestion des affaires de la cité a déjà été testée dans la commune de Ouaguenoun durant la précédente mandature. L'ancien président de l'APC, issu de la liste FFS, avait mis en œuvre sa promesse électorale qui consistait à installer un Conseil consultatif communal (CCC) regroupant les représentants des comités de villages, des membres du mouvement associatif et des universitaires et autres spécialistes de la localité. Il s'agissait pour les élus locaux de consulter leurs concitoyens avant que les membres de l'Assemblée adoptent les délibérations qui touchent notamment aux projets de développement local. Cette expérience a été saluée par la population locale, particulièrement parce qu'elle a évité les conflits entre villages, mais aussi parce qu'elle a fait des élus locaux de véritables partenaires des villageois. Malheureusement, cette expérience n'a pas été copiée par les autres communes de la wilaya, et même du territoire national. Et ce n'est pas toujours par manque de volonté de faire participer les citoyens. Il faut dire que ce n'est pas toujours facile pour les élus locaux de faire participer une population qui manque cruellement d'organisation. En effet, dans de nombreux villages et quartiers, la démobilisation de la société a donné un sacré coup à la représentativité des comités. Et pour le commun des mortels, il est très difficile de faire le tri entre les comités de villages et de quartiers représentatifs de leurs populations et les coquilles vides occupées par des individus qui ne représentent même pas les membres de leurs propres familles. Le doute est là et il n'est pas aisé de le lever tant que la population ne réapprend pas à s'intéresser à la communauté et à la vie politique et à choisir ses représentants en toute conscience et en toute responsabilité. Le cas de la commune d'Azazga est très édifiant. Les membres de cinq comités de villages multiplient les actions de protestations contre le maire de la ville et ont même réussi à faire intervenir le wali de Tizi Ouzou qui a dépêché une commission d'enquête. Le président de l'APC, de son côté, conteste les accusations de ses détracteurs et se réjouira des résultats de l'enquête qui l'a blanchi. Mais le maire d'Azazga, toujours offensif, va jusqu'à remettre en cause la représentativité, donc la légitimité des membres des comités de villages contestataires, affirmant que les habitants des cinq villages concernés ne soutenaient pas les membres des comités qui demandent, ni plus ni moins, la dissolution de l'Assemblée communale. Si le maire s'est permis de remettre en cause publiquement la représentativité de ses détracteurs, c'est que le doute est toujours permis et la démission de la population des affaires de la cité ne permet pas de s'assurer de la légitimité de ceux qui se présentent comme représentants légitimes. Donc, si le gouvernement veut la participation citoyenne dans les affaires de la cité, il devrait d'abord remobiliser les citoyens pour que cette participation soit le plus large possible et pour que les élus locaux aient des vis-à-vis représentatifs de leurs populations. Il s'agira aussi d'organiser le cadre dans lequel les citoyens seraient amenés à s'impliquer dans la mesure où ils ne devraient pas marcher sur les plates bandes des élus locaux qui, eux, sont tout à fait légitimes du fait qu'ils soient dans les Assemblées locales grâce au vote citoyen. Les pouvoirs publics ne doivent surtout pas oublier que les élus locaux sont issus du suffrage universel et il ne doit pas s'agir de réduire leurs prérogatives déjà très limitées. Parce que dans ce cas, au lieu d'avoir des partenaires dans la gestion des affaires locales, les élus locaux risquent d'avoir des éléments de déstabilisation et de blocage qui ne serviront pas la population locale. M. B.