Les présidents chinois, Xi Jinping, et taïwanais, Ma Ying-jeou, doivent se rencontrer samedi prochain à Singapour, une première dans l'histoire tumultueuse des deux pays. Les deux pays aux régimes politiques antagonistes entretiennent des relations tendues depuis 1949. Malgré des moments d'améliorations sporadiques depuis sept ans, portées par une coopération économique de plus en plus franche, les relations diplomatiques sino-taiwanaises restent globalement marquées par la défiance. Notamment depuis la proclamation par Mao Tsé-toung de la République populaire de Chine (RPC) il y a 66 ans. Pour Pékin la grande île du Sud fait partie intégrante de la Chine. Réfugiés sur l'île Formose ancien nom de Taïwan les nationalistes du Kuomintang (KMT) sous la houlette de Chang Kai-shek (1887-1975) avaient alors mis en place leurs propres structures politiques. Pour de nombreux observateurs ce sommet est une tentative de la Chine de promouvoir une formation considérée comme plus favorable à Pékin dans l'optique de la présidentielle de janvier prochain. Pékin parierait sur un statu quo profitable d'autant plus que l'économie fonctionne. Mais ce pari de Pékin reste risqué selon des médias occidentaux car nombre d'électeurs pourraient bien faire payer dans les urnes au Kuomintang au pouvoir la domination grandissante de la Chine. Il s'agit bien d'une étape historique celle de la rencontre entre les deux Présidents. Pour le directeur du Bureau chinois des affaires taïwanaises, Zhang Zhijun, cité par Chine nouvelle «cette réunion sera soutenue par tous les milieux des deux côtés du détroit et par la communauté internationale». «L'objectif de la visite du président Ma est d'assurer la paix de part et d'autre du détroit (de Formose) et de maintenir le statu quo dans le détroit», a ajouté le porte-parole du président taïwanais, Charles Chen. Les Etats-Unis ont bien évidemment salué prudemment l'annonce de la rencontre. Le porte-parole de la Maison- Blanche souhaiterait «voir sur quoi débouche réellement la rencontre». Si les Etats-Unis soutiennent un apaisement des relations entre Taipei et Pékin, ils pourraient estimer que le rapprochement est allé trop loin et a finalement affaibli Taïwan, selon des observateurs. Le KMT, dont est issu Ma, est aux affaires de façon quasi-ininterrompue à Taïwan. Ma s'est caractérisé par un activisme remarqué depuis sa première élection en 2008 en travaillant à réchauffer des relations jusqu'alors difficiles avec la Chine. Cette dernière considère toujours l'île comme une partie intégrante de son territoire. En juin 2010 fut signé un accord-cadre de coopération économique entre les deux pays et la reprise des vols aériens directs. Mais nombre de Taïwanais craignent que l'industrie et l'agriculture locales ne pâtissent de ce rapprochement avec le géant du Nord. Le principal mouvement d'opposition, le Parti démocratique progressiste hostile au rapprochement avec Pékin favori pour la prochaine présidentielle, accuse Ma de chercher à orienter le vote. Pékin et Taipei ont renoué en 2014, mais les rapports restent tendus. Récemment Pékin a rejeté la candidature de Taïwan à la nouvelle Banque asiatique d'investissement, au prétexte que ce pays, dont le nom officiel est République de Chine pourrait le faire «sous une appellation appropriée». En mai dernier le Président chinois a rappelé que pour Pékin il n'y avait qu'une «seule Chine». M. B./Agences