Le Conseil d'Etat a annulé, la première quinzaine du mois dernier, les élections du conseil de l'Ordre d'Alger. Cette décision, prise à la veille de la tenue d'une assemblée générale extraordinaire dont le thème prévoyait un débat sur l'avant-projet de loi portant organisation de la profession d'avocat, a été considérée par les membres du bâtonnat d'Alger comme une réplique au refus par la corporation de ce texte. C'est loin d'être l'avis des contestataires qui, récusant le bon déroulement des élections, avaient introduit des recours au niveau du Conseil d'Etat. Pour eux, la décision ne coïncide pas avec la tenue de l'assemblée générale car «celle-ci était prévue bien avant, pour le 29 décembre, puis a été reportée. C'est un pur hasard». La notification de la décision du Conseil d'Etat au conseil de l'Ordre est attendue normalement la semaine prochaine. Une fois qu'il l'aura reçu, le bâtonnat d'Alger sera illégitime et devra dans les jours qui suivent organiser de nouvelles élections. Selon les textes de loi régissant la profession, c'est au bâtonnat sortant d'organiser les élections et c'est justement là que le problème va se poser. Me Chaoui, l'un des dépositaires du recours auprès du Conseil d'Etat, estime que, si cette haute institution a donné sa décision d'annulation des élections en retenant les griefs soulevés par les contestataires notamment «la fraude», il ne serait pas judicieux ni rationnel que l'organisation échoit à ce même conseil de l'Ordre : «Il faudra dans ce cas-là revenir aux us et coutumes comme le prévoit l'article 1 du code civil.» Pour étayer sa vision des choses, Me Chaoui précise : «Une commission indépendante devrait être choisie pour l'organisation des élections. Les membres devraient alors avoir le consensus de tous les candidats.» Pour Me Chorfi, ex-bâtonnier, il y a là un vide juridique qui devrait être comblé avec la révision des textes de loi : «Il faudrait sûrement recourir à une commission indépendante ou à un conseil des sages». Me Sellini ne partage pas cet avis et estime que c'est au conseil de l'Ordre d'organiser les élections : «On ne peut pas faire les choses à l'encontre des textes de loi. C'est au conseil de l'Ordre du bâtonnat sortant d'organiser les élections. Il s'agit de respecter les textes qui régissent notre profession, ceux qui les récusent doivent s'adresser à la justice.» Donnant des exemples d'élections annulées au niveau d'autres wilayas, comme Constantine ou encore Tlemcen, Me Sellini soutient que le conseil de l'Ordre installera la commission de surveillance des élections en lui soumettant la décision du Conseil d'Etat : «Cette commission aura pour tâche de veiller au bon déroulement des élections en respectant les remarques du Conseil d'Etat.» Quant à l'avant-projet portant organisation de la profession d'avocat, Me Sellini affirme que «la copie va être étudiée de nouveau par le ministère de la Justice en collaboration avec l'ensemble des bâtonniers représentant la corporation à l'échelle nationale». A préciser enfin que l'un des reproches fait à Me Sellini par les contestataires est de n'avoir pas débattu et rejeté ce texte durant les deux mandats où il était bâtonnier national. H. Y.