Les nominations des lieux et de leurs habitants, des tribus et de leurs territoires, des personnes et de leur généalogie sont des domaines à la fois spécifiques et complémentaires, sensibles et cruciaux, objet de légitimation historique dans le passé et au présent L'onomastique, l'étude des noms propres, leur étymologie, leur formation, leur usage à travers les langues et les sociétés est au cœur d'un colloque international intitulé «L'onomastique dans le monde arabe et le Sahel» qui a débuté, hier, à Constantine dans le cadre de la manifestation «Constantine, Capitale de la culture arabe 2015». Le colloque, qui se poursuivra jusqu'au 3 février prochain, a été inauguré par un cycle de conférences. Les intervenants ont présenté des conférences portant sur la toponymie antique de la Numidie, la problématique du système de romanisation des caractères arabes aux caractères latins, ainsi que sur les dysfonctionnements dans la normalisation des noms géographiques. Le responsable du département colloque a affirmé à ce sujet lors d'une conférence de presse animée dimanche passé à Constantine que «les toponymies constituent un élément important de l'identité des peuples et du processus historique d'identification», rapporte l'APS. A ce sujet, il a indiqué que le président de la division arabe de la toponymie, du groupe d'experts des Nations unies pour les noms géographiques (Genung), Awni Khaswana, abordera les efforts déployés dans le monde arabe pour normaliser les noms géographiques. Dans ce contexte, le colloque consacrera un volet à l'onomastique dans la littérature arabe, à travers les noms des personnages et des lieux rapportés dans les romans, et axera sur les nouvelles pratiques caractérisant les réseaux sociaux et leurs impacts sur l'onomastique. Les organisateurs ont également souligné que l'objectif de ce colloque est de mettre en évidence, entre autres, l'intérêt stratégique de la toponymie dans l'élaboration des cartographies, du recensement et des statistiques. Pour rappel, depuis quelques années, les chercheurs universitaires et les spécialistes algériens œuvrent de plus en plus à sortir cette discipline de l'ombre mettant en relief l'importance de définir les choses par leurs noms. Ainsi lors de précédentes rencontres, les universitaires ont souligné que l'intérêt du domaine onomastique proprement dit, toponymique et ethnonymique surtout, émergent de manière singulière dès les débuts de la colonisation, et cela, pour des raisons évidentes de stratégie militaire. A notre époque, les travaux sont menés de front sur les trois couches linguistiques dominantes de l'onomastique locale : berbère, arabe, française. Il est important aujourd'hui, de remonter aux racines même de cette discipline ainsi comme il a été souligné lors d'un précédent colloque que «le savoir onomastique renvoie à des représentations collectives du passé et à des projets et attentes collectifs, privés ou institutionnels». Depuis la formation du libyque et du berbère et de leurs contacts avec le punique, le grec, le latin, l'arabe, l'espagnol, le turc, le français et du point de vue de la linguistique historique et même pré-historique, certaines dénominations soulèvent des questions très complexes et dépassent largement le territoire d'une région, d'une ou de plusieurs religions, d'une couche historique ou d'une catégorie onomastique. Il a également été précisé à propos des noms propres que «le patronyme est à la fois un signe d'identification à l'espace de référence du groupe, la marque d'appartenance à une lignée et l'inscription de cette lignée dans cet espace de référence. Il est souvent le témoin du vécu de toute une collectivité, transporteur d'un profond message culturel, fossilisé dans les noms propres». Aujourd'hui, il est plus qu'évident que «les questions des nominations des lieux et de leurs habitants, des tribus et de leurs territoires, des personnes et de leur généalogie sont des domaines à la fois spécifiques et complémentaires, sensibles et cruciaux, objet de légitimation historique dans le passé et au présent». S. B.