Mi-avril, la réunion de printemps du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale (BM) à Washington s'est déroulée dans un climat d'inquiétude. Le FMI avait révisé une fois de plus à la baisse ses projections relatives à la croissance mondiale, avec un taux de croissance annuel prévu à peine supérieur à 3% pour cette année et l'année prochaine. Mi-avril, la réunion de printemps du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale (BM) à Washington s'est déroulée dans un climat d'inquiétude. Le FMI avait révisé une fois de plus à la baisse ses projections relatives à la croissance mondiale, avec un taux de croissance annuel prévu à peine supérieur à 3% pour cette année et l'année prochaine. Si cela se passe ainsi, ce sera un triste résultat. Avant 2007, la croissance mondiale (mesurée selon la méthodologie du FMI) était de l'ordre de 4,5% à 5% grâce à l'amélioration de la productivité des pays industrialisés et à la hausse rapide du niveau de vie dans de grands pays émergents comme la Chine, le Brésil et la Russie. Aujourd'hui les USA sont confrontés aux incertitudes de l'élection présidentielle, les pays les plus faibles de la zone euro continuent à se débattre dans les difficultés, le Japon risque de subir une contraction économique marquée, le Brésil est en pleine crise politique, la Chine fait face aux conséquences d'une expansion budgétaire prolongée et à l'onde de choc générée par la croissance explosive de son système des «banques de l'ombre», tandis que le faible prix des matières premières nuit aux résultats économiques de beaucoup d'autres pays émergents. Par ailleurs les Britanniques pourraient voter en juin leur sortie de l'UE. La confiance a un impact sur l'activité économique : les consommateurs s'attendent-ils à une augmentation de leurs revenus (ou simplement à leur pérennité) et les entreprises pensent-elles que les perspectives de croissance sont suffisamment favorables pour justifier des investissements ? Aujourd'hui le pessimisme l'emporte. Pourtant une stagnation mondiale est peu probable à moyen terme. De nouvelles technologies apparaissent tous les jours et des milliards d'hommes et de femmes aspirent à améliorer leurs conditions de vie par l'éducation et le travail. Depuis une dizaine d'années, les grands pays industrialisés font preuve d'une résilience remarquable face aux crises du secteur financier - et il en est de même de la Chine. Aux USA le taux de chômage est redescendu à 5% et la situation de l'emploi est tout à fait satisfaisante dans certains pays européens. Quant au cycle du prix des matières premières, il ne faut pas oublier que c'est… un cycle : la demande pour les matières premières varie rapidement, ce qui n'est pas le cas de l'offre, d'où la volatilité du prix des matières premières et du pétrole. La grande question est de savoir si l'on peut sortir de ces montagnes russes économiques et revenir à une croissance mondiale robuste sans creuser une dette générée due à la surconsommation comme cela s'est passé aux USA avant la crise de 2008, sans surinvestir comme l'a fait la Chine et sans faire exploser les dépenses publiques (ce qui reste encore un problème dans certains pays européens). Nous agissons comme si le crédit était le seul moyen de financer des investissements productifs et d'améliorer le capital humain. Cela tient en partie à la réglementation fiscale qui permet dans certains pays aux emprunteurs de déduire le montant des intérêts (par exemple sur les prêts immobiliers aux USA) de leur revenu imposable. Et le plus souvent les intérêts versés par les entreprises sont eux aussi déductibles. Mais le principal attrait du crédit est de reposer sur un contrat des plus simples : soit on rembourse les sommes convenues, soit on ne le fait pas. Si tout se passe bien, une entreprise très endettée ou un acheteur immobilier rentabilisera facilement son investissement. Par contre, en cas de crise économique investir peut conduire à des pertes importantes. C'est ce qui s'est passé pour les acheteurs de biens immobiliers en 2008, pour les conglomérats coréens en 1997 et à de multiples reprises pour les pays émergents. Les responsables politiques savent que le surendettement conduit à la fragilité financière. Depuis une dizaine d'années on cherche à diminuer l'endettement en procédant à des réformes financières. Mais il est difficile de le faire durant une crise économique lorsque la principale préoccupation est de relancer la croissance. A ce moment là les dirigeants politiques trouvent beaucoup plus simple de maintenir telles qu'elles réglementation, incitations et garanties financières. Les grandes firmes financières s'accommodant parfaitement d'un endettement important, elles font un lobbying intensif contre toute réforme visant à exiger d'elles une plus grande part de fonds propres dans leur bilan. La taille des grandes banques américaines - mais c'est la même chose presque partout - est plus importante aujourd'hui qu'elle ne l'était avant 2008. Les informations recueillies en toute honnêteté montrent que leurs systèmes d'incitations internes n'ont guère évolués et que les limitations apportées à leurs activités ne seront sans doute pas efficaces lorsque la croissance mondiale reprendra. Aux USA les autorités espèrent que les grandes firmes financières devront finalement respecter une disposition de la loi Dodd-Frank de 2010 qui exige qu'elles établissent un plan de secours explicitant les mesures qu'elles prendraient en cas de faillite, sans aide publique et sans conséquences pour l'économie mondiale. Or malgré des demandes répétées, la plupart des grandes banques n'ont pas fourni de plan convaincant en ce sens, mais aucune n'a véritablement été sanctionnée pour cela. La croissance va reprendre. Les entrepreneurs vont créer de nouvelles entreprises et financer leur prise de risque par la participation de fonds de capital-risque. Hors secteur financier, les entreprises ont appris sur le terrain qu'elles doivent être attentives à leur endettement et conserver une marge de liquidité suffisante. Or les grandes banques persistent à choisir la voie du surendettement et trop de responsables politiques se soumettent à leur volonté. Que cela plaise ou pas, on peut donc s'attendre à de nouvelles tempêtes sur l'économie mondiale. S. J.