Photo : S. Zoheir En 2005, le président Abdelaziz Bouteflika, qui s'était rendu au port d'Alger pour l'inauguration du nouveau navire Tassili II, avait fait remarquer au premier responsable de la wilaya d'Alger, M. Mohamed Kebir Addou, que la capitale était loin d'offrir un visage attrayant. Le wali avait alors tenté de présenter au chef de l'Etat les réalisations de ses services dans le cadre de la salubrité de la capitale en affirmant que la rénovation de l'ensemble du littoral était attendue. Loin d'être satisfait par cette réponse, le premier magistrat du pays avait alors dit : «Il s'agit, là, d'un vieux projet. C'est de la théorie et il faut aller vers l'application.» Le mécontentement du président Bouteflika était perceptible dans ses propos : «Les immeubles en face de l'hôpital Mustapha devaient être rénovés depuis quatre ans et rien n'a été fait. Vous ne pouvez pas ne pas les voir», avant de renchérir avec une pointe d'ironie : «Même si vous, vous ne les voyez pas, eux [les immeubles] ils vous voient.» Pourtant, quelques mois auparavant, M. Addou avait annoncé la mise en œuvre d'une nouvelle politique comportant trois volets : embellissement, nettoiement et éclairage public. Une enveloppe d'un milliard de dinars avait été dégagée pour l'équipement et la prise en charge de ces engagements. Ce programme «riche», annoncé en grande pompe à la presse, n'avait apparemment pas porté ses fruits, de l'avis même du chef de l'Etat. Ce n'est, là, qu'un exemple parmi tant d'autres de l'état des immeubles et des cités dans la capitale et dans d'autres régions du pays. En plus de l'insalubrité, l'anarchie urbanistique rend le décor des plus rebutants. Pourtant, des sommes faramineuses sont injectées pour l'amélioration urbaine dans les villes et les villages mais sans pouvoir mettre fin aux constructions illicites ni à l'anarchie urbanistique qui portent atteinte au tissu urbain, déjà mis à mal par une gestion hasardeuse. L'Etat a décidé, l'année dernière, de réagir en promulguant une loi fixant les règles de mise en conformité des constructions et leur achèvement. Cette loi n° 08-15 du 20 juillet 2008 a pour objet de fixer les règles de mise en conformité des constructions mais a aussi pour objectifs de mettre un terme à l'état de non-achèvement des constructions et de promouvoir un cadre bâti esthétique et harmonieusement aménagé. Une décision qui vient à point après les recommandations du président de la République à son ministre de l'Habitat. Rappelons que le chef de l'Etat avait lors d'un Conseil des ministres chargé son gouvernement d'accélérer la mise à jour des instruments d'urbanisme, tout en soulignant la responsabilité des collectivités locales qui devront assumer pleinement leur devoir en la matière. Evoquant le cadre urbain qui ne connaît pas d'amélioration malgré les enveloppes financières allouées, le Président a donné instruction afin que les retards relevés en la matière soient rattrapés. «Les crédits nécessaires ayant été mobilisés, aucune excuse ne sera désormais tolérable. Il appartient aux administrations centrales et locales d'assumer leurs responsabilités et de faire preuve d'un esprit d'initiative pour résoudre cette question», avait-il averti. Il est important de relever que, dans nos villes, il n'existe aucune harmonie dans l'aménagement. Chacun construit comme bon lui semble. Toutes les wilayas du pays- même au Sud malheureusement- ont un «visage» défiguré ! A qui incombe la faute ? Selon un représentant de l'ordre des architectes algériens, l'absence de stratégie urbanistique en est la principale cause. Aucune projection n'est faite lors de la construction d'une nouvelle ville, d'un cadre bâti ou encore d'un lotissement. Aucune règle n'est prise en compte pour la réalisation d'un ensemble de constructions et d'espaces extérieurs publics, alors que ces derniers doivent être agencés selon les dispositions des instruments d'urbanisme qui prévoient une harmonie des formes, la qualité des façades d'une construction y compris celle des espaces extérieurs. Même dans un lotissement, le partage de l'assiette foncière doit se faire en conformité des prescriptions du plan d'urbanisme. Quant à la gestion de ces cadres urbains, elle constitue, également, un casse-tête chinois. Selon des responsables du secteur, l'insalubrité est due au manque de civisme. Certes, n'est pas citadin tout habitant d'une cité mais –car il y a un mais– la faute n'incombe pas seulement aux habitants des cités. Sinon, comment expliquer que les nouvelles cités AADL se retrouvent, moins de trois ans depuis leur livraison, dans un état de dégradation alors que les acquéreurs payent des charges de gestion assez importantes (près de 3 000 DA mensuellement) ! Il apparaît donc évident que dans la gestion d'une cité, il faut le concours de tout le monde : citoyens et autorités locales. En premier lieu, une réhabilitation des cités est nécessaire. En second lieu, un entretien permanent doit être fait contre des charges payées par les locataires. Cet entretien peut être fait soit sous l'égide de l'organisme propriétaire de la cité (OPGI, EPLF, CNEP), soit délégué à une entreprise privée qui doit veiller au nettoyage des cages d'escalier, au remplacement des lampes grillées des paliers ou encore à la régularité du passage du camion des ordures ménagères tout en veillant au respect des horaires de sortie des poubelles. Gérer une cité ne devrait pas relever de l'impossible puisque chaque citoyen gère bien son chez-soi ! Et si ce dernier rêve d'un site clôturé, d'un ensemble d'immeubles harmonieux, d'espaces verts et d'aires de jeux pour ses enfants, il devra mettre la main à la poche pour réaliser son souhait. Une chose est certaine : en dépensant de l'argent pour avoir un cadre de vie agréable, l'Algérien veillera à sa préservation !