Peut-on sérieusement envisager de tuer tous les assassins et tous les violeurs pour sécuriser la société et la protéger de leurs méfaits ? N'y a-t-il pas d'autres solutions un peu plus humaines ? Cette démarche radicale serait-elle, ensuite, en mesure de réduire durablement le taux de criminalité ? Peu probable ! Dans les pays qui appliquent encore cette loi du talion, la statistique macabre des exécutions judiciaires est paradoxalement en constante hausse ! Les exemples dans ce domaine ne manquent pas. En dépit de l'intransigeance et de la fermeté de la justice américaine sur ce principe de la «juste» réciprocité du crime et de la peine, les attaques et les agressions à mains armées font toujours des ravages dans quasiment tous les Etats de l'Union. Aucun espace n'échappe à la furie maladive des snipers et des loups solitaires qui, très souvent, sont canardés sur le lieu même de leur forfait. L'Arabie saoudite et le Pakistan, au nom de la chariâa (loi d'inspiration religieuse), appliquent aussi rigoureusement la peine capitale, mais le nombre des condamnés, loin de se rétracter, ne cesse de grossir, d'année en année. C'est, en quelque sorte, l'effet inverse qui s'est produit. Ce débat, ô combien sensible de la réactivation de l'application de la peine de mort, revient avec insistance en Algérie. Face au fléau des enlèvements et des assassinats d'enfants, des parents éplorés, des imams et d'autres acteurs de la société civile plaident pour le retour au «qiças». Œil pour œil, dent pour dent ! En échos, d'autres voix, toutes aussi récurrentes, se positionnent pour l'abolition de la peine de mort, en évoquant les droits de l'homme et l'inefficacité de ce traitement de choc. Des deux bords, des politiques se joignent à la dispute pour appuyer l'un des deux camps contre l'autre, sans vraiment éplucher le dossier en profondeur et aller plus loin dans l'analyse. Bref, le débat sur cette question «capitale» est fortement politisé. Notre pays n'exécute plus ce type de sentences depuis 1993, au lendemain de la ratification d'un moratoire onusien sur le sujet. La peine de mort, gelée depuis, est transmuée en prison à perpétuité. Cela n'a pas l'air de plaire aux partisans du droit divin et principalement les partis islamistes pour qui la «guillotine» représente la seule réponse adéquate aux tueurs et aux violeurs d'enfants. Un criminel emprisonné à vie ne peut plus nuire à la société. Le fait de lui ôter la vie ne s'explique, donc, pas par le besoin de protéger cette dernière, mais obéit plutôt à d'autres considérations, notamment religieuses. En se substituant à Dieu, cette pratique participe à la «fanatisation» de la société et éveillent de vieux instincts sanguinaires et revanchards propres à l'ère antéislamique. S'agripper à ce passé révolu n'est pas sans conséquence sur la bonne morale publique d'aujourd'hui. L'assassin ordinaire est, très souvent, un pauvre bougre perturbé et psychologiquement instable qui cède (dans un moment de folie passagère) à un instinct animal. En l'enfermant pour le reste de ses jours, c'est déjà chèrement payé ! Pourquoi faut-il encore le tuer, si ce n'est pour faire peur à l'ensemble de la société sans distinction. Or, le temps où l'on dirigeait les hommes par la peur et l'effroi est bel et bien révolu. Dans son fameux plaidoyer pour l'abolition de la peine de mort, Victor Hugo a assimilé le crime à une maladie. «Cette maladie aura ses médecins qui remplaceront vos juges, et ses hôpitaux qui remplaceront vos bagnes». L'idée d'une grande noblesse. K. A.