Pour nourrir une population mondiale qui devrait dépasser les 9 milliards d'ici à 2050, l'humanité devra produire davantage de nourriture, tout en utilisant moins de ressources naturelles et en réduisant considérablement les pertes et le gaspillage Le climat change et il est crucial de relever les défis liés à la faim et à la pauvreté simultanément afin d'atteindre les Objectifs de développement durable fixés par la communauté internationale. Tel est le message dominant de la Journée mondiale de l'alimentation cette année, qui a été célébré à Rome et dans plusieurs pays à travers le monde. «Les températures plus élevées et les aléas météorologiques compromettent déjà la santé des sols, des forêts et des océans dont dépendent les secteurs agricoles et la sécurité alimentaire», a déclaré aujourd'hui M. José Graziano da Silva, directeur général de la FAO, au cours de la cérémonie de la Journée mondiale de l'alimentation. «Les sécheresses et les inondations sont plus fréquentes et intenses tout comme les épidémies de maladies et de parasites liées au climat», a-t-il ajouté, citant le terrible impact du phénomène El Niño dans certaines régions d'Afrique, d'Asie et d'Amérique centrale et plus récemment l'ouragan Matthew en Haïti. «Comme d'habitude, les populations les plus pauvres et souffrant de la faim sont celles qui en pâtissent le plus, la plupart d'entre eux sont des petits agriculteurs familiaux qui vivent dans les zones rurales des pays en développement», a précisé le directeur général de la FAO, soulignant en outre à quel point l'adaptation au changement climatique et l'atténuation de ses effets étaient deux éléments fondamentaux qui nécessitaient «un bien meilleur accès aux technologies appropriées, au savoir, aux marchés, à l'information et aux investissements». Les derniers engagements internationaux visant à agir, dont l'Accord de Paris sur le climat et le Programme de développement durable à l'horizon 2030, prennent en considération le rôle fondamental de l'agriculture durable dans la lutte contre le changement climatique, la faim et la pauvreté. Le slogan de la Journée mondiale de l'alimentation 2016 : «Le climat change, l'alimentation et l'agriculture aussi» souligne le fait qu'afin de nourrir une population mondiale qui devrait dépasser les 9 milliards d'ici à 2050, l'humanité devra produire davantage de nourriture, tout en utilisant moins de ressources naturelles et en réduisant considérablement les pertes et le gaspillage. La volonté politique Dans son discours, le Premier ministre italien Matteo Renzi a insisté sur le fait que la lutte contre la faim était surtout un problème politique «l'Italie soutient l'idée que le chemin à parcourir afin de parvenir à la sécurité alimentaire, est de nos jours, une affaire politique avec un P majuscule», a-t-il affirmé. M. Renzi a également déclaré que la communauté internationale devait également régler, et ce, de manière urgente, les problèmes d'inégalité et d'injustice. L'Italie fera de son mieux afin de s'assurer que ces thèmes feront partie des priorités du programme international, y compris lors de deux évènements importants qui se dérouleront en mars prochain : le sommet du G7, que l'Italie accueillera et présidera et une réunion des chefs d'Etats européens. Le Premier ministre italien a également exprimé le souhait que l'Europe en finisse avec la «culture du gaspillage». L'Italie a récemment voté une loi visant à lutter contre le gaspillage alimentaire, qui «privilégie la collaboration à la punition». La Princesse Lalla Hasnaa du Maroc faisait également partie des conférenciers de la cérémonie d'aujourd'hui. Alors que son pays accueille le mois prochain la COP 22, elle a indiqué que les discussions sur le climat seraient «orientées vers l'action» et vers la mise en œuvre de l'Accord de Paris. «La Présidence marocaine s'efforcera d'entretenir et de promouvoir l'esprit de mobilisation qui a prévalu à Paris, dans le but d'augmenter le financement climatique, de développer l'expertise et d'assurer le transfert des technologies. Il s'agira notamment de mettre l'accent sur l'adaptation, surtout dans les pays du Sud et les petits Etats insulaires», a déclaré la Princesse Lalla Hasnaa. Appel à la solidarité avec les «réfugiés climatiques» Dans un message spécial lu au cours de la cérémonie, le Pape François a fait le rapprochement entre l'impact du changement climatique sur les champs tout autour du monde, sur la pêche, les forêts et la migration des populations originaires des zones rurales dans les pays en développement. «Des données récentes révèlent que le nombre de «réfugiés climatiques» est en hausse, gonflant ainsi les rangs des exclus et des oubliés qui sont marginalisés, mis de côté par la grande famille humaine», a déclaré le Souverain pontife. «De par la sagesse des communautés rurales, nous pouvons apprendre un style de vie qui peut nous aider à nous protéger de la logique de consommation et de production à tout prix, une logique qui masquée sous de bons arguments, tels que l'augmentation de la population, a finalement pour seul objectif d'augmenter les profits», a-t-il précisé. Le Pape François a exprimé son inquiétude quant au nombre croissant d'acteurs dans le secteur agricole qui «pensent être omnipotents ou qui ignorent les cycles des saisons, et qui, en modifiant maladroitement les espèces animales et végétales, vont provoquer une perte de variété qui, si elle a sa place dans la nature, a et doit avoir une fonction précise». Ce qui «pourrait donner d'excellents résultats dans un laboratoire pourrait être bénéfique pour certains mais pourrait aussi avoir des conséquences désastreuses pour d'autres», a-t-il dit. Il a également insisté sur le fait que face à de tels problèmes, le monde devrait surtout compter sur la sagesse que les agriculteurs, les pêcheurs et les éleveurs «se transmettent de génération en génération». De son côté, Macharia Kamau, Envoyé spécial de l'ONU pour El Nino et le climat, a insisté sur la nécessité «de renforcer la solidarité et les actions, d'établir de meilleurs partenariats et d'innover, avec notamment les régimes d'assurance destinés à protéger les familles et à réduire les risques liés aux programmes humanitaires». «L'une des principales priorités du Programme de développement durable à l'horizon 2030 est de lutter contre la pauvreté, s'assurer que personne ne souffre plus de la faim et qu'il y ait assez de nourriture pour tout le monde. Et rien d'autre ne menace plus cet objectif que le changement climatique», a-t-il déclaré. «Nous devons changer la manière dont nous appréhendons l'alimentation et l'agriculture. Il s'agit notamment de s'assurer que les petits producteurs ruraux sont plus résilients que jamais bien avant de connaitre les effets du changement climatique», a précisé Kanayo F. Nwanze, président du Fonds international pour le développement agricole (FIDA). «Si un jour nous devons briser le cycle de la pauvreté et de la faim, nous devons concentrer nos efforts sur ces petits producteurs qui représentent des sources de nourriture pour leurs familles et leurs communautés, mais qui sont vulnérables aux effets du changement climatique». Ertharin Cousin, directrice exécutive du Programme alimentaire mondial (PAM) a indiqué pour sa part que «le changement climatique poussait déjà dans ses retranchements le système humanitaire international au niveau financier et opérationnel, et que dépasser le stade de l'aide humanitaire suite à une catastrophe pour s'atteler à la gestion des risques était une mission urgente pour tous. Plus de 80% des personnes souffrant de la faim dans le monde vivent dans des zones sujettes aux catastrophes naturelles et à la dégradation environnementale. Le changement climatique n'attend pas, nous ne le pouvons pas non plus». Le Sommet des maires Lors de la Journée mondiale de l'alimentation, la FAO accueille également le deuxième Sommet annuel des maires, au cours duquel les maires et les membres des gouvernements de plus de 45 villes discuteront des progrès effectués en matière de réalisation des objectifs du Pacte de Milan sur les politiques alimentaires en milieu urbain. Le Pacte invite les villes à développer des systèmes alimentaires plus durables et équitables, à mettre un terme à la faim, à promouvoir des régimes alimentaires sains, à réduire le gaspillage et à protéger la biodiversité tout en s'adaptant au changement climatique et en atténuant ses effets. PRNA Source : Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO)