Photo : APS Par Youcef Salami Une session conjointe de concertation entre le Conseil national économique et social (CNES) d'Algérie et le Conseil économique et social de France (CESE) a été organisée les 22 et 23 février au palais des Nations, Alger. Elle a donné lieu à un riche débat sur la façon dont il faut impliquer la société civile dans le développement humain, dans la coopération et le partenariat entre les deux pays. Une question centrale a cependant focalisé une partie du débat : faut-il s'occuper seulement du partenariat et occulter l'époque coloniale, les crimes coloniaux, la mémoire ? Dans son intervention, le président du CNES, Mohamed Seghir Babes, a souligné qu'il faut mettre dans l'acte déclaratif un document signé par le CNES et le CESE, quelque chose qui interpelle notre mémoire, parce que c'est un moment «indépassable». Il estime que l'on est devant un dilemme : ou bien on laisse passer des fragments de mémoire (des fragments ulcérés) de génération en génération, ou on lève un tabou. Je pense, a-t-il ajouté, qu'il faut dégager une démarche à «visage humain», aller, par diverses solutions, à une «interpellation intense, ultra volontariste». Le propos du président du CNES se veut une sorte de mise au point à l'adresse de participants français à cette session et qui avaient, au premier jour des débats, mis en avant, à mots voilés, le fait que la repentance n'était pas une solution appropriée. Jacques Dermagne, président du CESE, a, lui, estimé qu'avec l'Allemagne on a fait beaucoup de choses ensemble (Ariane, Airbus…). Et, pourtant, la France a vécu des drames intenables, a-t-il dit. Jacques Dermagne n'en dira pas davantage. Voulait-il se distancer d'un débat dont il ne se sentait pas concerné ? Possible ! Christine Therry, représentante de «Famille de France», une association hexagonale qui regroupe dix-sept millions de familles françaises d'origine étrangère résidant sur le sol français, a noté qu'il faut regarder «vers l'avenir», que tout un chacun fasse des efforts pour construire quelque chose ensemble dans le pourtour méditerranéen. Elle a évoqué le personnage de l'Emir Abdelkader et sa contribution à la valorisation des droits humains. Elle a ainsi rappelé une de ses phrases célèbres contenues dans une lettre qu'elle a d'ailleurs envoyée à certaines associations, à des organismes français. Il disait que l'Occident tend à «régenter» le monde (…) qu'il n'a pas «la sagesse», qu'il ne fait pas de «discernement». Christine Therry a beaucoup parlé de capital humain, d'investissement dans l'éducation, la santé, non sans rappeler cette évidence : qui dit investissement espère un retour sur investissement. Elle a estimé par ailleurs que «la France est pour vous [Algériens] une passerelle vers l'Europe». Cette Europe, la représentante de «Famille de France» souhaite qu'elle ne soit pas «repliée sur elle-même» mais «ouverte». Mohamed Bahloul, directeur de l'Idrh d'Oran était de cette session. Il a fait un long exposé sur une thématique d'actualité en ces temps de crise économique : «Le développement du capital humain, un puissant levier dans la coopération.» Mohamed Bahloul énumère sept points fondamentaux pour un bon levier de partenariat : diversifier les canaux de coopération entre la France et l'Algérie ; renforcer les institutions gérant les programmes horizontaux (formation, éducation…) ; impliquer les sociétés françaises dans le financement des programmes de formation managériale ; créer des institutions de référence (Business School de haut niveau, université libre…) ; encourager la formation des femmes managers ; soutenir les activités de recherche ; aider à la structuration du marché, de la formation des compétences algériennes… La session sus-évoquée se poursuivra aujourd'hui à Marseille.