Les Bleus de Raymond Domenech ont bu la tasse et l'équipe de France, approximative et impuissante, a pris l'eau devant une formation conquérante des Pays-Bas. L'Europe du traité de Lisbonne, elle, dans un tout autre contexte, politique, bien sûr, est allée à… Waterloo après le «non» irlandais au traité simplifié de Lisbonne. Décidément, les hasards du calendrier de l'Euro 2008 et les coïncidences de l'agenda de la construction européenne se sont conjugués pour donner un goût particulier, bien particulier, à la déroute du football français et au naufrage du traité européen. La défaite sportive française et celle, tout à fait politique, des eurocrates de Bruxelles, ont un goût d'autant plus singulier que le match France - Pays-Bas opposait deux équipes dont les pays avaient déjà dit non au traité européen. On se souvient que ce texte, initialement jargonneux et abscons, sera plus tard «simplifié» sous la forte impulsion du président Nicolas Sarkozy. Double pied de nez, donc. Juin est assurément un mois très particulier pour la mémoire collective française. Il n'est pas seulement la période des espoirs. Comme ceux que symbolisa «l'Appel du 18 juin», celui de la résurrection d'une France humiliée par les nazis et le régime capitulard de Vichy, lancé de Londres par le général de Gaulle. En juin, il y a aussi la bataille de Waterloo. En ce 18 juin 1815, l'armée française, menée par Napoléon Bonaparte, but le calice jusqu'à la lie face aux «armées alliées» composées de Britanniques, de Prussiens et de Néerlandais. Déjà, ces sacrés Bataves ! Certes, le football n'est pas la guerre. Et l'homme de théâtre qu'est le coach français n'est pas Napoléon 1er. Mais en filant les métaphores sportive et politique on pourrait dire que Napoléon a perdu à Waterloo, et Domenech contre le stratège néerlandais Marco Van Basten la bataille de Berne dont le théâtre d'opération fut le «stade de Suisse-Wankdorf». Domenech, qui affiche désormais un pessimisme de rigueur quant aux chances de son équipe d'accéder aux quarts de finale, a-t-il pour autant perdu irrémédiablement la guerre de l'Euro 2008 ? Oui, si l'on s'en tient à la loi des probabilités. Non, si l'on croit au prodige d'une prochaine victoire française contre une Italie jouant, elle aussi, contre les Bleus le match de la survie ou de la mort. Cette hypothétique victoire française n'aurait de sens qu'en cas de défaite ou d'un score de parité de la Roumanie face à des Néerlandais déjà qualifiés. Les coqs gaulois, qui n'ont pas encaissé 4 buts depuis 1982, précisément face à la Pologne, attendent désormais un miracle. La vie des Bleus ne tient plus désormais qu'à un fil. Une fibre aussi ténue qu'un cheveu. Mais pour que le miracle puisse se réaliser, il faut que l'équipe de France fasse le pèlerinage de Lourdes après être allée à Canossa, face aux Pays-Bas. Et, Canossa, pour la petite histoire, c'est en Italie. N. K.