Les élections se sont déroulées et les résultats préliminaires sont connus. Dans quelques jours, le Conseil constitutionnel se prononcera sur les recours et rendra publics les résultats définitifs mais cela ne va pas changer considérablement la tendance. Le FLN et le RND resteront en pole position et la configuration de la future Assemblée populaire nationale (APN) demeurera nettement dominée par la majorité qui gouverne depuis l'accession du président Bouteflika à la magistrature suprême. Une assemblée élue avec un taux de participation de 37,09% correspondant à 6 514 282 voix, parmi lesquelles plus de deux millions de bulletins nuls. Malgré l'abstention de plus de 15 millions d'algériens, il n'en demeure pas moins que la nouvelle chambre basse du Parlement est élue et sera une assemblée mosaïque avec la présence de 36 partis et un groupe d'indépendants. Cependant cette élection n'a pas fait que des heureux même parmi les vainqueurs. En effet, la triomphe du FLN, qui a raflé la mise avec 164 sièges à l'APN, est en réalité un déboire puisque le parti d'Ould Abbès a reculé de 44 sièges, récupérés par son rival le RND qui a enregistré une nette progression passant de 68 à 97 sièges. Commentant ces résultats, le secrétaire général du FLN, Djamel Ould Abbès, a estimé que le recul du nombre de sièges obtenus par sa formation politique est dû à la participation d'un grand nombre de formations politiques à cette échéance, affirmant que son parti demeurait malgré tout «la première force politique du pays». Le Rassemblement national démocratique (RND), le vrai gagnant de cette élection, s'est, sans surprise, félicité de la progression de près de 50% du nombre de ses députés. La satisfaction est affiché également par les partis qui ont enregistré une importante progression lors de ce scrutin à l'exemple du Front Al Moustakbal dont le président Abdelaziz Belaïd n'a pas manqué d'exprimer son contentement des résultats, les qualifiant de «positifs» même s'il prévoyait de meilleurs résultats. «Le front Al Moustakbal est passé de deux sièges en 2012 à 14 sièges en 2017, ce qui «donnera une nouvelle impulsion à son action», a estimé M. Belaïd. Il y a aussi le Mouvement Populaire Algérien (MPA) qui a progressé en remportant 13 sièges contre 7 lors des législatives de 2012, et Tajamou Amel Jazaïr (TAJ) d'Amar Ghoul qui rejoint l'hémicycle de Zighoud Youcef avec 19 députés. Les listes des indépendants crient aussi à la victoire puisque 28 sièges leur reviennent. Mais comme déjà souligné, les élections du 4 mai n'ont pas fait que des heureux. Le premier déçu est sûrement le courant des islamistes, dont la coalition ne semble pas avoir porté ses fruits. En effet, Le Mouvement de la société pour la paix (MSP) qui a présenté des listes communes avec le Front du changement (FC) a obtenu la troisième place avec 33 sièges. Cette coalition n'a pas manqué d'accuser les partis au pouvoir de bourrage d'urnes, de menaces et de violences contre ses militants, affirmant qu'elle serait arrivée en tête sans la fraude. De même que l'alliance Adala-Ennahda-Bina s'est classée à la 6e place avec 15 sièges. Et il n'y a pas que les partis de la mouvance islamiste qui crient à la fraude. Le PT, qui a reçu un coup dur avec seulement 11 sièges, le FFS avec 14 sièges et le RCD avec 9 sièges, ont également dénoncé ces résultats. En effet, autant pour le FFS que pour le RCD, le scrutin n'a pas été aussi propre qu'on l'a promis. Louisa Hanoune a clairement «dénoncé le parti pris de l'Administration en faveur du FLN» et, dans le même temps, expliqué le recul de son parti par «la volonté du pouvoir de lui faire payer son engagement aux côtés des travailleurs». Qu'ils soient contents ou mécontents des résultats, les 36 partis ayant obtenu des sièges lors du scrutin vont siéger à l'APN et devront construire les nouvelles lignes de forces de cette institution, car dans cette Assemblée il n'y a aucun parti qui a la majorité absolue et donc aucun parti ne pourra dicter «sa loi» au sein de la nouvelle APN. A première vue, les deux partis du pouvoir préservent leur hégémonie sur l'Assemblée en se partageant plus de 50% des sièges à l'APN, ce qui leur permet de continuer de gouverner sans avoir à nouer de nouvelles alliances. Djamel Ouled Abbès affirmait lors de la campagne électorale que son parti allait obtenir la majorité absolue laissant entendre qu'il n'aura nullement besoin de lier des alliances. Une fois les résultats connus, le secrétaire général du FLN a fait savoir que le parti est «disposé et ouvert» à travailler «sans hésitation» avec toutes les forces politiques avec lesquelles il partage les mêmes visions, soulignant que «l'unique condition» est l'application du programme du président de la République. En fait, le FLN, qui a mené une campagne contre le RND son ex-partenaire de l'Alliance présidentielle, sera obligé de «renégocier» le contrat avec le parti d'Ahmed Ouyahia pour des raisons arithmétiques, sinon il ne pourra rien faire à l'APN. C'est peu probable, mais si le RND refuse de faire alliance avec le FLN, là les cartes vont se brouiller et les jeux d'alliances vont s'intensifier. Les partis tels que le MPA, TAJ et El Moustakbal vont avoir leur poids mais pas seulement, même les indépendants, avec leur 28 sièges, et les 24 autres partis qui se partagent 44 sièges vont peser dans l'échiquier. Restera la ligne de force de l'opposition, dont celle des islamistes, qui totalisent moins de 60 sièges, et celle des démocrates avec près d'une quarantaine de députés. En rappelant qu'avec la nouvelle loi le nomadisme est exclu, il est donc clair que dans la nouvelle mosaïque qui compose l'APN, les lignes de forces vont peser sur les alliances. H. Y.