Le long métrage raconte les conditions sociales difficiles de la femme en Algérie, conditions dont elles sont, en partie, responsables. Il raconte également l'hypocrisie de la société Encore une fois, le public de Tizi Ouzou a brillé par son absence lors de la projection d'un film, comme à chaque fois. Il est vrai qu'il n'existe pas à la cinémathèque de la ville des genêts une politique agressive d'information, mais cela n'explique pas la défection du public lors des projections. D'ailleurs, il n'y a pas que le 7e art qui souffre de ce phénomène puisque même les pièces de théâtre se jouent dans une salle du théâtre régional Kateb-Yacine désespérément vide. Et cela fait mal quand il s'agit d'œuvres qui méritent le détour, comme Torchaka, d'Ahmed Rezzak, présentée il y a quelques mois devant quelques dizaines de personnes seulement. Mais ce qui s'est passé samedi dernier en fin d'après-midi à la Cinémathèque de Tizi Ouzou est pire. Environ dix personnes uniquement ont assisté à la projection du long métrage Lalla Zbeïda ouennas que Yahia Mouzahem a réalisé dans le cadre de la manifestation «Constantine, Capitale de la culture arabe 2015». Cette mésaventure n'a pas découragé le jeune réalisateur, qui a tenu à répondre présent au cinéclub qu'abrite mensuellement la Cinémathèque de Tizi Ouzou. «C'est partout pareil», déplore-t-il, en affirmant qu'il est toutefois prêt à débattre, à discuter, «parce que c'est ce qui m'intéresse». Et le débat a tourné autour d'un thème qui est d'actualité, même si l'histoire de Lalla Zbeïda remonte aux années soixante du siècle dernier. Le sujet reste encore d'actualité, puisqu'il s'agit encore et toujours de la condition de la femme au sein de la société algérienne. Yahia Mouzahem a choisi de montrer des scènes de la vie quotidienne de familles algériennes vivant sous le même toit. Il a filmé les conditions de vie difficiles de la femme dans la société. Sans vouloir donner de leçon, comme il l'a expliqué lors du débat qui a suivi la projection. Le réalisateur raconte dans ce long métrage de 87 minutes la vie de Lalla Zbeïda, une femme qui règne en «maître» dans une grande maison de la Casbah de Constantine. C'est l'épouse du propriétaire qui loue des chambres à d'autres familles. Tout le film tourne autour de Lalla Zbeïda, y compris dans les scènes qui ne la montrent pas. Elle soupçonne son mari de la tromper avec une voisine plus jeune et de vouloir la prendre comme seconde épouse. Lalla Zbeïda, tantôt forte tantôt fragile psychologiquement, va jusqu'à penser commettre un meurtre pour supprimer la «concurrente», mais dans la précipitation et dans un manque de clairvoyance, elle tue la jeune sœur de sa voisine. Après cela, tout se passe rapidement, et toute la force de Lalla Zbeïda qu'elle utilisait pour soumettre sa belle-fille et toutes les femmes de la «grande maison», s'est transformée en grande faiblesse causée notamment par la culpabilité. Elle se suicidera en se jetant du pont suspendu de l'antique Cirta à un moment où sa belle-fille, Habiba, prenait le dessus et tombait enceinte (signe de pérennité de la famille et de prise de pouvoir dans la sphère des femmes). A première vue, le film raconte les conditions sociales difficiles de la femme en Algérie. En partie, des conditions dont sont responsables les femmes elles-mêmes. Il raconte également l'hypocrisie de la société qui fait que le mari de Lalla Zbeïda, Hadj Abderrahmane, vit dans le mensonge, l'adultère et la tromperie, tout en étant hadj et pratiquant. Yahia Mouzahem dit ne pas avoir voulu donner de leçon à la femme algérienne ni à la société en général, mais seulement montrer des scènes que le téléspectateur lui-même va comprendre et déceler. D'un autre côté, il dit avoir fait un grand effort dans le casting, notamment en recrutant des actrices tunisiennes, parmi lesquelles Saousen Mâalej qui a campé formidablement bien le rôle principal. Enfin, le film est tiré du scénario écrit par Hafidha Mrimeche, mais le réalisateur a apporté des changements qu'il a estimés nécessaires, comme il l'a souligné à la Cinémathèque de Tizi Ouzou où le public était absent, mais les quelques dix personnes présentes étaient sorties très satisfaites de la qualité du film et du jeu de rôle des comédiens. M. B.