La migration des populations est un phénomène aussi vieux que l'humanité. A la recherche d'un environnement plus clément, d'une source d'eau ou de nourriture, l'homme a de tout temps sillonné les quatre coins du globe. C'est plutôt la sédentarité qui est un élément nouveau dans le processus de développement du genre humain. Il ne faut pas s'étonner, dès lors, que l'homme continue son périple. Seules les nouvelles données démographiques (la Terre comptait moins de700 millions d'habitants au 18e siècle contre 6,5 milliards actuellement), économiques (20% de la population possède 80% des richesses) et politiques (nouvelles frontières, visas, état civil), rendent le processus plus contraignant. Si, malgré les nouveaux moyens de transport, la migration devient un acte de plus en plus compliqué, les raisons des déplacements restent sensiblement identiques à celles des ancêtres (la recherche d'une vie plus agréable). Ces complications ont engendré une nouvelle donnée qui vient perturber l'ordre établi : il s'agit de la migration illégale. Selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), il y aurait plus de 200 millions de migrants internationaux dans le monde actuellement (3% de la population mondiale). Entre 20 et 30 millions de migrants vivent dans l'illégalité, ce qui représente de 10 à 15 % de la population des migrants. Europole (office de police criminelle intergouvernemental) estime le nombre de personnes qui franchissent chaque année, illégalement, les frontières de l'espace Schengen à 500 000. Par sa situation géographique, l'Algérie n'échappe pas à ce phénomène, particulièrement depuis le début des années 2000. La Ligue algérienne des droits de l'homme (LADHH) annonce le chiffre de 36 000 personnes ayant tenté l'expérience de la harga, 3 000 y auraient laissé la vie et des milliers seraient en détention dans les prisons européennes, dont 4 000 en Espagne.D'après le bilan des forces navales pour l'année 2008, 98 corps sans vie ont été repêchés en pleine mer, 1 335 harraga interceptés et 43 embarcations arraisonnées. Des chiffres en augmentation par rapport aux années précédentes (1 259 clandestins interceptés et 61 cadavres repêchés en 2007). Selon la LADDH, 600 corps de harraga algériens sont en attente d'être identifiés et risquent l'incinération en Espagne. L'information est démentie par le ministre de la Solidarité en charge du dossier. Ce dernier assure que seuls neuf cadavres non identifiés, et pas tous des Algériens, font l'objet de recherches d'identification. «On est en contact avec quelques familles algériennes concernées qui acceptent de faire des prélèvements d'ADN pour faciliter les recherches.» En plus du spectre de la mort qui plane sur la tête des adeptes de la migration clandestine (près de 3 300 cadavres retrouvés à Gibraltar entre 1997 et 2001), un autre malheur les guette, à savoir la traite des personnes. Une pratique que les réseaux de passeurs affectionnent particulièrement en se servant de la détresse des gens pour les asservir et les exploiter. Et quand, par miracle, ils réussissent à éviter ces deux abysses et à franchir les frontières du pays convoité, traque, peur et anxiété deviennent leurs compagnons de vie.