De notre correspondant à Paris Merzak Meneceur Trois millions de Français, selon le syndicat CGT, ont battu le pavé jeudi dans plus de deux cents villes françaises afin de manifester leurs inquiétudes et exiger du gouvernement de nouvelles mesures sociales pour faire face aux effets nocifs de la crise en matière d'emploi et de pouvoir d'achat. Le succès de cette seconde journée de mobilisation nationale, après celle du 26 janvier, est reconnue par toutes les forces politiques du pays même si la droite et le gouvernement tendent à minimiser sa dimension et relativiser son impact.Expression d'une véritable grogne sociale qui s'amplifie de jour en jour, car chaque quotidien amène son lot de fermeture d'usines et de licenciements, les manifestations de jeudi ont confirmé le haut degré de mobilisation des salariés, même si les grèves sont restées à un niveau moyen, et conforté l'utilité de l'unité syndicale Car, comme très rarement en France, ce sont pratiquement tous les syndicats, huit, qui activent ensemble depuis des mois pour amener le gouvernement à les entendre et modifier sa politique économique et sociale qui, selon eux, n'est pas conforme aux exigences de la lutte contre la crise économique et à l'équité sociale. Les mesures prises, suite à la première journée de mobilisation, 2,6 milliards d'euros pour le social, alors que la relance par l'investissement s'est vue accorder 26 milliards, sont jugées insuffisantes. Le fait que les classes les plus aisées de la société ne sont pas mises à contribution et bénéficient toujours de cadeaux fiscaux, semblent exaspérer ceux qui sont au chômage, ceux qui craignent de le devenir et ceux qui vivent des minimums sociaux. Réuni vendredi matin pour examiner les suites à donner à sa lutte, l'Intersyndicale a convenu de prendre du temps en vue de «rechercher les modalités les plus adaptées pour donner encore plus d'efficacité aux prochaines mobilisations».Les huit syndicats, qui ont apprécié l'«ampleur incontestable, tant en nombre de grévistes du privé que du public, par le nombre de manifestants», ont décidé de se retrouver le 30 mars pour décider des suites à donner. Les réactions gouvernementales ne se sont pas fait attendre puisque dès, jeudi soir, le Premier ministre, François Fillon, a exprimé l'inflexibilité du gouvernement qui se maintiendra aux mesures déjà prises il y a quelques semaines, dont la mise en oeuvre n'a pas commencée. Du Palais de l'Elysée, on a estimé que les manifestants ont exprimé «une angoisse collective» mais pas «une défiance» au président de la République. Une manière de rejeter la balle à la seule crise mondiale comme unique source des maux sociaux du pays. Confirmation de cette appréciation, vendredi après-midi, par Nicolas Sarkozy qui, depuis Bruxelles, où l'Union européenne préparait le G20 de Londres, déclarait que les manifestations ont exprimé «l'importance de l'inquiétude d'un certain nombre de salariés face à la crise mondiale». Sans promettre la moindre modification de sa politique économique et sociale, le président français a juste rassuré de la mise en œuvre, «sans délai des mesures qui ont été décidées». Des mesures «importantes» selon lui, comme les mesures fiscales qui vont permettre à 6 millions de contribuables de la classe moyenne inférieure à ne pas payer d'impôts sur les revenus, et la prime de 200 euros à trois millions de foyers. Des mesures insuffisantes et incomplètes disent les syndicats pour qui la lutte continue, non seulement contre les effets de la crise mondiale mais contre les choix du gouvernement porteur d'injustice sociale.