Défilé unitaire historique pour le 1er Mai en France. Des dizaines de milliers de personnes ont manifesté hier à l'appel des syndicats français, faisant du 1er Mai un nouveau temps fort de mobilisation. La troisième grande journée de revendication sociale en Hexagone a brillé par une forte mobilisation. Des millions de manifestants ont battu le pavé à travers toute la France en réponse à l'appel lancé par les principales organisations syndicales (Cfdt, Cftc, FO, CGT, CFE-CGC, FSU, Solidaires, Unsa). Hier, l'immense défilé s'est ébranlé de Denfert-Rochereau à la Bastille. L'événement - les médias parlent de «G8» syndical - signe au fer rouge une troisième journée d'action intersyndicale en application de la déclaration commune issue de la rencontre du 30 mars 2009, pour faire de ce 1er Mai une nouvelle démonstration de colère. «Le gouvernement devra, tôt ou tard, répondre aux revendications», est la déclaration de Bernard Thibault, secrétaire général de la CGT qui résume l'état d'esprit des syndicats. M.Thibault a énuméré les causes ayant conduit les syndicats à radicaliser leurs actions et considère que l'augmentation du nombre de chômeurs, la baisse significative de la consommation, l'incertitude grandissante sur l'activité des entreprises témoignent de la gravité de la crise qui frappe un nombre croissant de salariés. Les mobilisations viennent obliger le gouvernement à agir sur les stock-options et les rémunérations exceptionnelles des dirigeants d'entreprise lorsque ces dernières ont reçu des aides publiques directes. Sur la question de la redistribution des richesses produites, les syndicats estiment que le décret annoncé par le président Sarkozy, bien qu'insuffisant, est un début de remise en question du système actuel. Cependant, les manifestants pensent que l'essentiel des revendications du 5 janvier 2009 portées par les mobilisations du 29 janvier et du 19 mars 2009, n'a pas été pris en compte. Aussi, gouvernement et patronat doivent-ils rapidement mettre en oeuvre les mesures déjà prises et engager des négociations et des concertations avec les syndicats pour répondre à l'ensemble des revendications. Les dirigeants des confédérations syndicales veulent ainsi maintenir la pression sur le gouvernement à travers des collectifs interprofessionnels installés localement qui mobilisent dans l'unité sur tout le territoire. Du côté du patronat, le Medef invite, comme de coutume, les syndicats à venir discuter pour trouver des solutions idoines. Mais en l'absence de solutions aux problèmes du monde du travail, le scénario de grève à répétition se profile à l'horizon, avec en sus une impatience qui trouve dans la radicalisation et la surenchère une expression du désarroi social. Cette situation apparaît effectivement dans les phases qui ont vu les salariés séquestrer les patrons sur les sites de travail, avec les débordements inévitables déjà remarqués. Sinon, que vaut, à titre d'exemple, la programmation de grandes journées de manifestations, cycliques sans résultat? C'est une des appréhensions des dirigeants syndicaux qui font face à une mue imprévisible de la revendication sociale. Les actions de protestation qui ont eu lieu dans des filiales de groupes étrangers alors que la justice est fréquemment sollicitée pour les entreprises, ne respectant pas les normes sociales, ou encore celles qui procèdent à des «dégraissages», pis à la fermeture de sites et le travail à temps partiel sont autant d'obstacles dénoncés par les syndicats et les travailleurs, constituant autant de défis à relever par le gouvernement Fillon qui tente d'apaiser un climat social en ébullition. Selon Le Monde, 855 manifestations revendicatives ont été organisées à Paris depuis le début 2009, soit une augmentation de 16% par rapport à 2008, indiquent des statistiques publiées par la préfecture de police de Paris. 25% des défilés sont non déclarés au préalable à l'administration, contre 15% en 2008. Aussi, la police prévoyait-elle quelque 280 manifestations unitaires à travers le territoire français durant la journée du 1er Mai. Lors de la journée du 29 janvier dernier, rappelle-t-on, la police a enregistré un million de manifestants contre 2,5 millions selon les syndicats. A noter que les Français soutiennent à 72% cette mobilisation. Enfin, les syndicats se réunissent ce lundi pour décider «du calendrier des prochaines initiatives».