De notre correspondant à Constantine A. Lemili Le projet intitulé «Aménagement de la rue Kerkeri» devait être inauguré le 16 avril 2008 par le président de la République lors de sa seizième visite dans la ville des Ponts. Cette inauguration était d'ailleurs consignée noir sur blanc sur le programme des sites susceptibles d'être officiellement adoubés par le chef de l'Etat. Une année plus tard, les lieux sont presque en l'état même si les services de la commune ont tenté vaille que vaille de leur donner une allure en astiquant la dalle de sol des chemins piétonniers, de lustrer les colonnes et autres vitraux, de dépoussiérer l'intérieur des locaux dans le cas où un ministre, qui était en visite dimanche dernier pour s'enquérir de l'état d'avancement de la réhabilitation de la vieille ville, n'ait l'idée d'y faire un tour. M. Chibane, premier édile de la ville, que nous avons rencontré sur place en compagnie d'un vice-président (FNA) et auquel nous demandons de nous informer sur la date de livraison du site, répondra à notre question, très laconique : «Bientôt.» «Désolé, monsieur le maire mais bientôt ne nous avance en rien !» avons-nous insisté. «Dans les jours à venir… bientôt, quoi !» En fait, «l'aménagement de la rue Kerkeri» n'est qu'un exemple entre autres nombreux projets inscrits dans le cadre du programme d'extension de la wilaya pour ne pas dire de la ville de Constantine et qui souffrent de retards énormes dans la livraison, sinon dans l'entame des travaux.Cela étant, le projet «Kerkeri» aura coûté, après révision des évaluations initiales, plus de dix-huit milliards de centimes (180 245 715,15 DA) et cinq avenants supplémentaires sur les différents lots, à savoir «démolition - aménagement - électricité» modifiant les prévisions ou les montants arrêtés avant le lancement des travaux. Ainsi, de 76 millions de dinars au départ, le seul lot démolition est passé à 120… soit plus d'un tiers du coût initial. Il en a été de même pour les autres lots. Quant à l'attribution des locaux, le maire déclarera : «Cela m'échappe totalement et c'est le boss qui en décidera.» Le boss aux yeux de l'élu n'est autre que le wali, et cela quoique la place qui, auparavant, abritait une gigantesque et tout autant anarchique station de transport collectif urbain (taxi et bus) et les locaux situés à sa périphérie relèveraient de la gestion de la commune. Lors de leur délocalisation, les commerçants ont été évacués manu militari (la Tribune s'en était fait l'écho au début de l'année 2008) et pour ceux qui étaient propriétaires l'engagement de l'administration de leur donner en priorité le bénéfice de la jouissance des nouveaux locaux selon la superficie qu'ils détenaient. Ce qui, vraisemblablement, ne risquerait pas d'être honoré compte tenu du standing des locaux nouvellement réalisés et du prix. Il n'est pas exclu que l'administration aille encore vers un autre bras de fer avec certains anciens propriétaires. Quant à ceux qui étaient seulement locataires, «ils ont bénéficié de locaux de compensation au niveau de la nouvelle ville Ali Mendjeli», nous précisera M. Chibane.En conclusion, au lendemain de la visite de Cherif Rahmani, les travaux ont repris au rythme habituel qu'on leur connaissait, c'est-à-dire à un train de sénateur.Pour l'anecdote, la place des frères Kerkeri était à l'origine un bel espace où se rencontraient les habitants des immeubles limitrophes, de la vieille ville, et a accueilli, du temps des jours heureux, l'implantation de nombreux cirques, foires foraines, kermesses. Elle a ensuite été dévoyée, transformée en station de bus et de taxis. Les désordres techniques (glissement des sols) qui en résulteront seront à l'origine de la déstabilisation des locaux commerciaux, des caves d'immeubles (régulièrement inondées en raison des ruptures de canalisation), d'effondrement d'un mur de soutènement et de menaces contre l'intégrité physique des gens. En plus évidemment d'avoir constitué le repaire de la lie de la ville dont la réputation de coupe-gorge a alimenté la presse quotidiennement.