IL n'y a pas de fumée car il n'y a pas le feu. Ceux qui ont attendu les fumées vaticanes ont patienté ou se sont impatientés, en vain. Trêve de conjectures, de supputations et de spéculations. Place donc aux voix autorisées ou presque. Celle d'abord du président de l'Assemblée populaire nationale (APN), M. Abdelaziz Ziari, personnage numéro trois de l'Etat dans l'ordre de préséance protocolaire. Ensuite, c'est le chef du gouvernement M. Abdelaziz Belkhadem qui abondera dans le sens du président de l'APN. Ces deux personnages, connus pour leur sérieux, leur sobriété et leur prudence de sioux, ne pouvaient pas interroger les oracles. Sans être forcément des porte-parole attitrés, les deux «Abdelaziz» seraient tout de même autorisés, soulignons-le. Tous les deux disent que la révision constitutionnelle aura bien lieu, incessamment sous peu. Donc dans un délai de quelques petites semaines. «Cela ne saurait tarder», a notamment déclaré M. Abdelaziz Ziari dans ces mêmes colonnes. Au sujet du modus operandi, le président de l'APN comme le chef du gouvernement suggèrent que la préférence du moment irait à l'adoption de la révision constitutionnelle par voie parlementaire. Précisément, à l'issue d'un congrès des deux chambres du Parlement. Le président de l'APN le dit encore avec des mots plus précis où le conditionnel n'est pas de rigueur : «Cela passera par le Parlement avec les deux Chambres réunies sur convocation du président de la République.» M. Abdelaziz Belkhadem, lui, use d'un conditionnel qui n'est toutefois guère hypothétique : «La voie parlementaire pourrait suffire», a-t-il dit dans une déclaration à notre consoeur du journal le Monde Florence Beaugé. Exit donc le référendum ? Tout porterait à le croire, si les paroles de MM. Ziari et Belkhadem sont d'or. Théoriquement, la voie parlementaire paraît inéluctable en raison du calendrier. D'ailleurs, le président de l'APN, qui a déclare à la Tribune qu'il «ne pense pas qu'il soit souhaité» d'«aller vers le référendum», invoque les délais impartis avant adoption de la révision constitutionnelle en rappelant «qu'à partir de janvier commencera la campagne présidentielle» et que «nous [les partis de l'Alliance présidentielle notamment] avons six mois pour finaliser le bilan qui va être dressé des années de mandature». Reste une probabilité : le président de la République pourrait estimer que la légalité et la légitimité politiques seraient à ses yeux insuffisantes. Dans une telle hypothèse, un référendum serait alors organisé, ce qui impliquerait que l'annonce de sa mise en oeuvre soit effectuée dans les délais les plus brefs. Quant au contenu de la future révision constitutionnelle, c'est M. Abdelaziz Belkhadem qui s'est chargé de laisser entrevoir les premières grandes lignes. Premièrement, il s'agirait d'un «régime présidentiel fort». Deuxièmement, le toilettage de la Constitution de 1996 se ferait dans le sens d'un «approfondissement démocratique». Troisièmement, l'article 74, qui fixe le nombre et la durée des mandats en les limitant actuellement à deux, serait amendé. De son point de vue, ce «verrou» serait «antidémocratique» du fait qu'«à l'heure actuelle, c'est le Président qui souffre d'exclusion en raison de cette limitation à deux mandats». M. Abdelaziz Belkhadem, qui semble avoir pesé ses mots au trébuchet, réfute toute idée d'allongement de l'actuel quinquennat de deux ans comme le souligne une question du journal le Monde. «Soit on permet un mandat plein et entier, soit on ne le permet pas.» D'après lui, une révision de la Constitution perdrait tout sens si elle pouvait avoir vocation à accorder au président de la République une simple prolongation temporelle. Et M. Abdelaziz Belkhadem de préciser enfin que «le peuple choisira entre plusieurs candidats, le président Abdelaziz Bouteflika n'étant pas en train de réclamer un mandat à vie». N. K.