La vue, c'est la vie. Et lorsqu'on on est médecin, on en sait sans doute un peu plus. Le Dr. Ahmed Adelmouneim en sait même un peu trop, lui qui avait perdu son œil un 16 novembre 1989, au détour d'une ridicule bagarre qui n'allait plus s'arrêter, poursuivant son cheminement dans les tribunaux. Une partie de la vie perdue pour le médecin cairote et autant, ou plus, pour Lakhdar Belloumi, accusé d'en être l'auteur avant d'être condamné par la justice égyptienne à la prison et poursuivi durant vingt ans par un mandat d'arrêt international. Vingt ans de cauchemar pour celui qui n'a jamais cessé de clamer son innocence dans la douleur, réduit à l'insoutenable intra–muros face à une vie de star qu'il avait tous les moyens de continuer à mener en capitalisant son image comme le font les stars de sa dimension après avoir raccroché les crampons. Dans la carrière d'un grand footballeur comme Belloumi, il y a forcément une autre vie après celle du joueur. Que d'invitations à des matches de gala d'anciennes stars mondiales déclinées, que de sollicitations pour de grandes chaînes de télévision impossibles à honorer et que d'occasions ratées de continuer à s'affirmer et à conserver cette aura gagnée sur le terrain dans un mythique numéro 10 qui n'a assurément jamais aimé un joueur algérien comme il l'a fait avec l'enfant de Mascara. Demandez à l'attaquant égyptien Mohamed Boutrika, fraîchement élu meilleur joueur arabe par El Hadef et le Buteur, et il vous dira que le meneur de jeu des Verts des années 80 était l'une de ses idoles quand il rêvait d'embrasser la carrière de footballeur. C'est pourquoi le geste du docteur Ahmed Adelmouneim a plus de sens et de valeur qu'il paraît en exprimer. Lorsqu'il en faisait voir de toutes les couleurs aux défenseurs européens et autres, Lakhdar -qui porte si bien son prénom- dessinait les rêves les plus audacieux chez tous les Arabes. L. I.