Alger compte un patrimoine forestier exceptionnel. Plus de 5 000 hectares de forêt répartis sur pas moins de 100 sites forestiers à travers l'ensemble du territoire de la wilaya d'Alger. Soit prés de 6,24% de la superficie globale de toute la wilaya. Ces forêts présentent une richesse extraordinaire. Pins, eucalyptus, oliviers, chênes-lièges, etc., la diversité de la forêt algéroise a longtemps fait le bonheur des résidants de la capitale. Cependant, aujourd'hui tout ce patrimoine forestier de la capitale et de ses environs se trouve en déperdition. C'est en tout cas le constat unanime que dresse sans aucune complaisance la Conservation des forêts de la wilaya d'Alger. Hier, sur les ondes de la radio El Bahdja, et sur le plateau de l'émission «le forum d'El Bahdja», Baaziz Nourredine, chef de la circonscription forestière de Baïnem, et Widdad Benghordine, chargée de gestion à la conservation forestière de la wilaya d'Alger, n'ont pas hésité à tirer la sonnette d'alarme et lancer un appel aux citoyens et pouvoirs publics pour qu'ils prennent conscience des dangers qui menacent la survie même de nos espaces forestiers. Urbanisme incontrôlé, occupation illicite des forêts, incendies et coupe illégale d'arbres sont, entre autres, les fléaux qui mettent, chaque jour davantage, en péril les 100 sites forestiers recensés dans la wilaya d'Alger. «Soumis à une très forte pression, ces sites subissent d'importantes dégradations. Malheureusement, de notre côté, on n'a pas toujours été bons dans la gestion et la surveillance de ce patrimoine, mais on a tiré les leçons des erreurs commises par le passé. Aujourd'hui, avec le concours des citoyens, il faut qu'on arrive à gérer notre espace environnemental», explique pour sa part Baaziz Nourredine. Notre interlocuteur reconnaît que l'administration forestière «ne peut répondre à la dimension des problèmes actuels» dont souffre le patrimoine forestier algérois. Et pour cause, avec seulement 60 agents forestiers, la Conservation des forêts de la wilaya d'Alger ne dispose même pas de moyens humains, et matériels aussi, indispensables pour assurer la protection, à travers un contrôle quotidien et régulier, des 100 sites forestiers. «Le travail que nous effectuons est insuffisant. Sachez qu'à Bouchaoui seulement, chaque week-end, nous enregistrons plus de 8 000 visiteurs. Avec l'effectif dont nous disposons, il nous est impossible d'assurer la protection de cette forêt de 70 hectares. Même la présence policière n'a pas porté ses fruits», relèvent également nos deux interlocuteurs dont l'administration, à défaut d'un inventaire forestier, n'arrive toujours pas à déterminer l'ampleur des ravages causés à la forêt. Dans ce contexte, on ne compte plus les violations exercées sur le patrimoine forestier. A la forêt de Ben Aknoun, des villas entières sont en train de s'élever en abattant des arbres de ce poumon de la capitale. Pas moins de 14 constructions privées sont érigées à l'intérieur de la forêt. Mis à la disposition des APC par un arrêté récent de la wilaya d'Alger, la plupart des sites forestiers de la capitale sont en état de dégradation avancé. Ces foyers d'oxygénation vitaux pour Alger risquent bel et bien de disparaître. Par ailleurs, en l'absence d'associations de défense des forêts, de civisme chez nos citoyens et de campagne de sensibilisation au profit des citoyens sur les bienfaits de la forêt et l'importance de sa protection, le patrimoine forestier algérois demeure condamné à souffrir longtemps encore. Mais, en dépit de tous ces obstacles, la Conservation des forêts de la wilaya d'Alger ne baisse pas les bras et refuse de laisser la forêt livrée à elle-même. Pour cela, un budget de 650 millions de dinars sera consacré au secteur des forêts au cours de cette année. Des agents recrutés viendront également étoffer le corps des forestiers. Pour garantir la protection de certains sites forestiers, 20 km de clôtures ont été réalisés depuis 2004. Pour parer aux dangers des incendies de forêt, des camions de première intervention ont été accordés aux brigades d'intervention, lesquelles seront mobilisées H 24 et 7 jours sur 7 au cours de l'été prochain. En parallèle, des actions de proximité seront mises en œuvre en partenariat avec des associations de quartier pour le reboisement des sites forestiers. Dans ce cadre, 3 000 plants ont été offerts à des associations de défense de l'environnement. La wilaya d'Alger a fait aussi appel à un bureau d'études espagnol spécialisé dans la transplantation des arbres. Enfin, le but de l'opération «une école, un enfant, un arbre» est de mettre en place des visites guidées au profit des écoliers. L'année dernière, 200 visites guidées ont été accomplies. Mais tout cela suffira-t-il pour sauver la forêt algéroise ? Rien n'est moins sûr… A. S.