Photo : S. Zoheir Par Samir Azzoug Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, effectuera aujourd'hui, une tournée dans la capitale. Plusieurs points figurent dans son programme, à savoir la commémoration du 47e anniversaire de l'attentat de l'OAS contre les dockers algériens (le 2 mai 1962), l'inauguration de la nouvelle ligne ferroviaire et la réouverture du jardin d'Essais d'El Hamma. Fermé au public depuis près de dix ans (officiellement depuis août 2001), la réouverture du site est attendue depuis plusieurs mois. La splendeur de cet espace n'a d'égal que son histoire. Considéré comme l'un des plus beaux jardins botaniques au monde, il fut fondé en 1832, soit à peine deux ans après l'invasion de l'Algérie par l'armée coloniale française. C'est à partir de 1868 que le jardin commence à acquérir sa réputation mondiale avant de devenir en 1913, à la fois une destination de promenade ouvert au public, un organisme central d'expérimentation et un centre d'enseignement. Au départ, le parc s'étalait sur 5 hectares. En 1837, cette surface s'avérant insuffisante, plusieurs domaines limitrophes lui sont incorporés pour atteindre 18 hectares. Plus tard, en 1867, par voie d'expropriation, des terrains de la famille Abd-El-Tif y seront annexés. De 1842 à 1867, la surface totale du jardin passe de 23 à 58 hectares. On dénombrait alors 8 214 espèces et variétés botaniques différentes. C'est en 1900 que le parc zoologique fut créé. Allant toujours en extension, le jardin, qui présenterait plus de 3 000 essences différentes, s'étend sur 62 hectares partant du ravin de la Femme sauvage sur les hauteurs du Hamma jusqu'à la baie d'Alger. Depuis une vingtaine d'années, ce joyau de l'Algérois, espace de recherche et de détente, n'a cessé de se détériorer. L'inconscience, l'insouciance et la cupidité du public et de certains responsables ont failli entraîner sa ruine. Il deviendra, pendant de longues années, l'endroit de prédilection des marginaux de tout acabit. Lieu de débauche, de consommation de drogue et de plaisirs interdits, le jardin change de vocation. Des pavillons, censés servir de bureaux ou de laboratoires, sont squattés, des commerces apparaissent, quelque 600 espèces végétales ont disparu, des animaux périssent par manque d'entretien (deux kangourous, un ours, un crocodile et une autruche sont morts en mois d'une année). Les déboires de cet espace aux valeurs historiques, culturelles, scientifiques et touristiques indéniables ne s'arrêtent pas là. Des vols de plantes et autres objets de valeur sont commis, comme celui du cycas mâle, un fossile qui coûte environ 350 000 DA ou la fameuse statue de la baigneuse qui a du être restaurée après les détériorations subies. Dans une volonté de redorer le blason de ce qui peut-être considéré comme plus important fournisseur d'oxygène de la capitale, au vu de la densité de sa végétation, le jardin d'Essais commence par changer de tutelle dès octobre 2006, par décret exécutif n° 06-350, qui le met sous la responsabilité de la wilaya d'Alger (donc du ministère de l'Intérieur) et non plus du ministère de l'Agriculture. Déjà, en 2005, la trentaine de familles qui occupait les pavillons dans l'enceinte du jardin en fût délogée. Les opérations de réhabilitation du parc ayant débuté en 2004 ont pour finalité de rendre au jardin sa vocation première : un espace de recherche, d'expérimentation et de promenade. Mais au-delà de la restauration, qu'est-ce qui est prévu pour protéger à l'avenir ce poumon de la capitale ? Existe-t-il une stratégie générale pour la gestion de cette espace ? Ce que l'on sait actuellement, c'est que le jardin d'Essais d'El Hamma a le statut d'entreprise publique à caractère administratif (EPA) sous tutelle de la wilaya d'Alger. Pour la protection du site, 60 agents sont prévus ainsi que 6 caméras de surveillance. Des chercheurs scientifiques demandent à l'Etat de classer ce site patrimoine national et patrimoine universel. Une mesure qui serait à même de garantir un contrôle plus strict de cet espace. Car restaurer c'est bien, mais comment lutter contre les détériorations ? Les convoitises et le laisser-aller sont une autre paire de manches.