Photo : Riad Par Abderrahmane Semmar En Algérie, la prévention et la lutte contre le sida sont confrontées à un sérieux obstacle : la méconnaissance des Algériens, notamment parmi les plus jeunes, des moyens de transmission du VIH est criante. Une enquête réalisée récemment par l'Association de solidarité et de lutte contre le sida sur le comportement des jeunes face aux maladies sexuellement transmissibles vient de démontrer ce constat amer. «Le sida reste une maladie taboue même en milieu universitaire», a relevé le président de cette association, Hassen Boufnissa, qui a rendu public jeudi, lors de la 9e Journée de sensibilisation contre le sida, tenue au Centre international des scouts de Sidi Fredj sur le thème «Les jeunes, la prévention et le partenariat», les résultats de cette enquête effectuée sur un échantillon de 458 étudiants, lycéens et collégiens d'Alger et de Boumerdès. Ainsi, d'après les résultats de cette enquête, dirigée par le professeur Rosa Belkaïd, épidémiologiste au CHU de Beni Messous, et réalisée sur la base d'un questionnaire distribué par les adhérents de l'association, un étudiant sur trois méconnaît la notion de séropositivité. En plus, pour le professeur Belkaïd, les fausses croyances persistent chez les étudiants, car, a-t-elle expliqué, un étudiant sur dix pense que la toux ou le moustique peuvent transmettre le VIH ! Et même si «la télévision, les journaux, la radio et l'école sont les moyens d'information les plus cités dans les réponses de l'échantillon ciblé», précise le professeur Belkaïd, il n'en demeure pas moins, relève encore notre interlocutrice, que «le préservatif comme moyen de protection n'est cité que par un étudiant sur deux et la fidélité dans le couple par moins d'un étudiant sur deux». Par ailleurs, et c'est là où le bât blesse, seulement un étudiant sur trois croit que le préservatif a un double rôle, à savoir un usage préventif contre le HIV et contraceptif. C'est dire donc que cette ignorance entraine une «prise de risque dangereuse chez les jeunes», s'inquiètent les spécialistes, d'autant que les résultats de l'enquête le prouvent : désormais, au moins «un étudiant sur quatre affirme avoir eu des relations sexuelles avec un partenaire non régulier au cours des 12 derniers mois». Et lors de chaque rapport sexuel, «un étudiant sur trois, seulement, indique avoir fait usage d'un préservatif lors d'un rapport sexuel», ajoute le professeur Belkaïd qui n'hésite pas à tirer la sonnette d'alarme sur les conséquences d'une conduite aussi dangereuse, à même d'encourager la propagation du sida au sein de notre jeunesse. «Tout ceci plaide pour l'intensification, poursuit le professeur Belkaïd, de l'information en milieu estudiantin, et chez les jeunes en général, notamment au collège, puisque, comme cela a été révélé dans cette étude, les rapports sexuels avant l'âge de 15 ans sont une réalité même s'ils sont de moindre fréquence». Le directeur de la prévention au ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière, Mohamed Ouahdi, est, lui aussi, de cet avis. Dans ce sens, il a plaidé haut et fort pour l'implication de la société civile dans la lutte contre le sida, qu'il a considérée comme indispensable. «Il y a une société civile en formation qui désire s'impliquer dans les efforts de lutte contre le sida et qui doit être associée aux campagnes de prévention et de sensibilisation», a-t-il souligné. Enfin, abordant le rapport entre drogue et sida, l'officier de la Sûreté urbaine de Boumerdès et membre de la cellule antidrogue, Benani Bousri, a indiqué de son côté que «2 à 5% des cas de contamination par le HIV sont le fait d'échange de seringues chez la population qui se drogue». Pour endiguer les proportions alarmantes de ce fléau, il a beaucoup insisté sur le travail de prévention et la nécessaire implication de la société civile.