Les malades stomisés vivent un calvaire au quotidien. Déjà traumatisés par le fait d'être, pour l'écrasante majorité d'entre eux, atteints de cancer (80% des cas qui conduisent aux stomies sont des cancers), ne voilà-t-il pas que la dépendance de ces malades par rapport aux pochettes d'évacuation de leurs déchets exacerbe leur état de «mutilés psychiques», leur causant une humiliation quotidienne. Leur désespoir et leur solitude n'ont pas d'égal. Leur maladie a constitué un grand tournant dans leur vie. Désormais, pour eux, rien ne sera comme avant. En effet, avoir un anus artificiel sur l'abdomen (par respect à ces malades, on ne peut donner d'autres détails) ne peut assurément que causer une honte insurmontable ! «J'ai personnellement vu des personnes qui ont tenté de mettre fin à leurs jours car ils ne supportaient pas les contraintes qui leur sont imposées, mais surtout, ils n'arrivaient pas à s'accepter et à accepter le regard que la société leur jette», dira en guise d'introduction à sa conférence de presse M. Rachid Rezgui, président fondateur de l'Association des stomisés d'Algérie. Pour le conférencier, qui est également membre de l'Association internationale des stomisés, la prise en charge de ces malades en Algérie laisse à désirer. Dans ce cadre, il regrettera le fait qu'on sollicite rarement le psychologue alors que ce dernier est à même de jouer un très grand rôle dans le processus thérapeutique. «Le rôle dévolu au psychologue dans le cas des malades stomisés est des plus importants. Mais, force est de constater que, chez nous, le psychologue constitue le parent pauvre de la médecine. Pour s'en convaincre, vous aurez certainement remarqué que nos médecins généralistes dirigent rarement leurs patients vers des psychologues. Il est impératif que cette situation cesse», tiendra à souligner M. Rezgui, ajoutant que l'association qu'il préside accorde une très grande importance à ce volet. «La préparation du futur stomisé à l'intervention est une opération capitale. C'est d'ailleurs l'un des objectifs que nous nous sommes fixés. Beaucoup de malades sont choqués après l'intervention, d'où l'importance d'un soutien psychologique. Mais il n'y a pas que cela. Les soins post-opératoires ne sont pas moins importants. Ces derniers englobent les contrôles post-opératoires, lesquels ne se font malheureusement pas au niveau de nos hôpitaux», relèvera le président de l'Association des malades stomisés, ajoutant que lui et son staff faisaient un très grand travail en matière de réinsertion des malades dans la mesure où les femmes et les enfants rejetés par leur époux et leur famille sont légion. S'agissant de l'aspect financier inhérent à l'association, son président indiquera que, depuis 8 ans, aucune subvention n'a été perçue. «Un industriel nous aide de temps à autre. Nous ne désespérons pas de voir les gens s'intéresser à nous. Le travail de sensibilisation du public est primordial. C'est toujours important de mettre en garde les gens contre les risques liés au cancer. Mais pareil dessein n'est pas facile à réaliser, un spot publicitaire à la TV coûtant les yeux de la tête», relèvera, avec une pointe d'amertume, M. Rezgui. En guise de perspective d'avenir, l'Association des stomisés d'Algérie compte mener une enquête sur les conditions de vie des malades et tout ce qui se rapporte à l'aspect socio-économique de ces derniers. «Peut-être qu'à la lumière des résultats de cette enquête nous allons rectifier le tir dans notre démarche envers les 40 000 stomisés qu compte notre pays», laissera entendre son président. A signaler que, prochainement, des portes ouvertes seront organisées par l'association au niveau de nombreuses wilayas du pays. Elles visent essentiellement à aider le malade et le faire sortir de son isolement. B. L.