Le vieux parti est un homme malade. Depuis sa fronde ouverte contre l'arrêt du processus électoral en janvier 1992, le FLN évolue dans un cycle de crises chroniques abortives. De 1992 à 1996, le parti a été un géant aux pieds d'argile dans la mesure où son hyperactivité n'a mobilisé que son sommet dirigé par Abdelhamid Mehri qui a résisté honorablement au chant des sirènes. Paradoxalement, c'est au cours de cette période que le FLN a fonctionné comme un véritable parti, même si sa base était douloureusement divisée entre sa fidélité au système (nidham) et sa discipline légendaire. Cette même base, tout comme lors de la crise de 2004, ne savait plus où donner de la tête. D'autant plus que l'ex-parti unique est pratiquement l'unique parti qui a changé de direction plusieurs fois sans pour autant se doter d'une démarche claire ni d'un programme politique cohérent. Le FLN est, certes, l'un des rares partis qui a une réelle implantation nationale et un enracinement certain dans des terreaux populaires qui le portent souvent comme un étendard et un symbole plus que comme un projet de société. Si, pour les anciennes générations, le FLN est le prolongement de leur propre combat libérateur, pour les nouvelles générations, le vieux parti est un tremplin pour une promotion sociale ou pour intégrer les rouages du pouvoir local et national. Tel que perçu et utilisé, le FLN ne peut que susciter une adhésion subjective et des convoitises à différents niveaux qui, une fois accumulées, créent des tensions qui finissent épisodiquement, et à la faveur d'échéances électorales, par des crises aiguës où des responsables laissent des plumes. La plus violente a marqué la présidentielle d'avril 2004 lorsque le parti a été scindé en deux camps rivaux se disputant les candidatures de Bouteflika et de Benflis. En fait, cette crise n'a été que la partie visible de l'iceberg dans la mesure où elle cachait mal une profonde crise du système politique algérien. Cet affrontement public entre deux tendances du FLN a été tranché en faveur du pouvoir constitutionnel, mettant ainsi fin au cabinet de l'ombre et au pouvoir parallèle et informel qui a souvent été à l'origine des grandes décisions. Cependant, si, en haut lieu, la question est tranchée, au sein du FLN les relents de la crise de 2004 sont toujours latents, d'où l'incapacité de Belkhadem à imposer son autorité sur le parti, y compris au sein de sa direction, et à lui imprimer une organisation et une marche cohérente et homogène. C'est manifestement ce qui est reproché aussi bien à l'ancien chef de gouvernement qu'au chef de l'instance exécutive du FLN. Peut-on donc parler d'ores et déjà d'un FLN de l'après-Belkhadem, alors que des échéances importantes attendent le vieux parti qui a fait de la révision de la Constitution et du troisième mandat son cheval de bataille. La cohésion de l'Alliance présidentielle ne peut se faire sans un FLN restructuré avec une direction politique élue dans un congrès. Cependant, le prochain congrès est extraordinaire, donc il ne peut statutairement élire une direction, à moins d'une entorse aux règlements. En tout état de cause, le FLN a plus besoin désormais d'une direction consensuelle que d'une stricte observance des règles s'il veut sérieusement valoriser les positions qu'il occupe tant au sein des institutions que sur l'échiquier politique national. A. G.