Cette fois-ci, ça se jouera à pile ou face pour le FLN. Un vrai bras de fer avec le RND d'Ahmed Ouyahia se profile à l'horizon. La bataille sera rude. La planète FLN a sombré dans un cycle de déphasage avec les réalités politiques actuelles dans le pays profond, alors que le RND a gagné en épaisseur. Du moins, c'est le sentiment qui court dans les mouhafadhas du parti. Mais, également, chez tous les autres. La Berezina est un mot qui revient à la mode dans les états-majors des autres formations politiques, après la levée de boucliers qu'ont provoquée les listes officielles arrêtées par Belkhadem. La contestation a gagné jusqu'aux bastions, jadis réputés sans problèmes. Oran, Constantine, Tébessa, Batna, Blida, Bouira, etc. Diagnostic: ce sont bel et bien les signes avant-coureurs que la machine du FLN, cette grosse cylindrée, est, cette fois-ci, bien grippée. La contestation accouche de l'incertitude. En période électorale, l'on ne se méfie, jamais assez, de la réaction de l'opinion face aux changements induits par la stratégie du parti qui cherche à engranger les dividendes. Mais, l'on oublie souvent que ce sont toujours les hommes qui déterminent les chances de succès d'un parti et pas son programme. Chez nous, le vote reste une affaire de clan, de famille. Le FLN de Belkhadem, sûr de lui et dominateur, est convaincu que ses réseaux à l'intérieur du pays fonctionneront à merveille, le 17 mai prochain. Le Makhzen du FLN peut-il faire aussi bien, en matière de miracle, que la lampe d'Aladin? Les législatives créent le climat d'une vraie Bourse politique. Le jackpot, ici, c'est l'enjeu principal. Faire mieux que Benflis en avril 2002. Battre son propre record, oui, du moment que tous les chefs entourant Belkhadem sont convaincus que les choses sont bien calées. Les stakhanovistes du vieux parti ne sont-ils déjà pas à l'oeuvre? C'est çà le pari des vieux briscards du FLN. La nouvelle génération, quant à elle, est déçue. Elle est convaincue que l'on a triché, une fois encore, avec les promesses faites dans les kasmas que les critères de sélection seront rigoureux, respectés et que l'on ferait plus de place aux jeunes, aux femmes et aux cadres méritants. Rajeunir le FLN, allez donc! Depuis cinq jours, la fièvre de la contestation gagne en ampleur. D'Est en Ouest, le vent de la fronde souffle sur la citadelle FLN. Ce qui augure mal, s'entendent la plupart des observateurs, du score du parti, au soir du 17 mai. Voilà pour le constat. Pour l'instant, Belkhadem a la trouille. Son dilemme serait de faire moins que dans la précédente législature. De perdre des sièges au seul profit du RND, déjà en position d'embuscade. Dans son rêve de conquête, le FLN continue de semer à tout vent. Plus populiste que jamais. Il est encore persuadé que la démagogie est à la politique ce que le sel est à la nourriture. Ahmed Ouyahia lui a reproché, ouvertement, ce week-end, au cours d'un débat à la Chaîne II, d'avoir coulé, ni plus ni moins, le programme du président Bouteflika, qu'il avait, lui, lors de son passage à la chefferie du gouvernement, mis en oeuvre. Pour des raisons de politique politicienne, il fait aussi grief à Belkhadem de manquer de vision dans la gestion des affaires. C'est sur ce terrain, et rien que sur ce terrain, que l'ancien Premier ministre veut jouer sa partition en arguant que l'on ne peut pas se proclamer le plus proche collaborateur du président, et en même temps, tourner carrément le dos à la réalisation de son programme. Celui-là même qui a permis son élection, à une majorité écrasante, en 2004. Comme le dit un vieux proverbe arabe: «On ne peut être compagnon du prophète (QSSSL) si l'on ne croit pas au Coran.» Il a presque envie de dire que la spécialité de Belkhadem est toujours de promettre, mais de ne jamais rien donner. De dire une chose, et immédiatement son contraire. Encore une autre marque de fabrique. «Cause toujours, mon grand», semble-t-il lui rétorquer. Pour le contrer publiquement, il décide de lui lancer carrément un exocet dans son jardin. Entre les deux hommes qui se sont toujours disputé «l'affection» du président, les scories se sont multipliées. Les coups bas aussi. A cela, les Algériens savent que ces deux là n'ont pas la même grille d'analyse. La République d'Ouyahia est différente de celle que promet Belkhadem. Le parti d'Ouyahia, à défaut de sortir grand vainqueur de ces élections, aura-t-il, cette fois-ci, un nombre beaucoup plus élevé de députés? Après tout, le RND n'est que le FLN bis dans lequel se reconnaissent les meilleurs enfants du pays, est-on tenté de dire. Convaincu de son combat, Ouyahia sait, selon la célèbre phrase de Buffon, que «le style, c'est l'homme». Belkhadem-Ouyahia: une belle affiche pour ces joutes électorales 2007. Pour le moment, l'ancien chef de gouvernement proclame sa loyauté à Bouteflika. Elle est totale. Sur quel flanc va-t-il attaquer Belkhadem? Son secret, il ne l'a jamais livré. Ouyahia est un coffre-fort. Et il est le seul à disposer de la combinaison.